mardi 11 juillet 2023

Pousser les portes du devoir (Un chemin étroit avec Gide) 19

 



Vierge voilée de Giovanni Strazza (XIXème sicèle)

(Photographie glanée ici : Livingstone)



« Le rêve de demain est une joie, mais la joie de demain en est une autre, et rien heureusement ne ressemble au rêve qu’on s’en était fait ; car c’est différemment que vaut chaque chose. » André Gide, Les nourritures terrestres


Mais c’est encore une chance de pouvoir rêver.

J’en connais tant pour qui cette chance là ne sourit plus guère.

Non qu’ils ne rêvent pas ou plus, mais le poids de la vie se fait si lourd que leurs rêves se tiennent à distance.

Si je pouvais demeurer à rêver devant ma fenêtre ouverte, ce serait absolu plaisir.

Plaisir rare que celui de rester l’oeil voguant dans les airs estivaux, l’esprit blanc de toute pensée anticipatrice.


Soyons raisonnable, contentons-nous de rêver dans l’instant.

D’éprouver cette fragilité de voguer vers des rives où se poursuivraient les idylles de la nuit.

Je voguais sur de frêles esquifs, les flots les emportaient très loin d’ici mais je savais que quelque part une belle âme serait là, souriante.

Je voguais.

Je vogue si souvent.


Je rêve, voguant, conscient que ce qui m’attend n’a pas grand chose à voir avec ce que mon onirisme me laisse envisager.

Chaque lendemain, à ce titre, est lendemain qui déchante.

Rien ne correspond vraiment à mes rêves.


Il me faut me satisfaire de cette différence.

De ce fossé entre rêve et dure réalité.

Conscient de ma chance de pouvoir encore rêver, j’apprends à me satisfaire de ce que l’instant m’offre d’inattendu, de non conforme à mes désirs.

Le problème s’il en est un, serait d’en tirer joie et non profit.

Depuis Gide, les flots du profits ont tant dénaturé le monde !



Xavier Lainé

19 juin 2023


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