samedi 27 février 2021

Sourde colère 39 (Nouveaux états chroniques de poésie - Volume 12 - Tome 1)

 




Il en est encore qui croient nos gouvernants désemparés devant la « pandémie ». Courbes et chiffres pris on ne sait où nous affirment qu’il en est ainsi.

Chose étrange que cette fiction qui englue nos cerveaux au point de nous détourner des mesures prises en coulisses qui visent à parachever l’oeuvre entreprise depuis quarante ans et plus.

Lente érosion quasiment au même rythme que celle des glaciers de notre potentiel humain.

Nous voici réduits à n’être que supplétifs de machines qui décideraient pour et mieux que nous de nos vies.

Réduction à la misère totale proportionnelle à l’envahissement de notre univers par des robots sans âme ni conscience.

Ceux qui les servent, adeptes de cette religion d’une science réduite à ses techniques, déconnectés d’un réel qu’ils ne cessent d’abîmer ont déjà perdu toute qualité humaine.

Ils répètent à l’envie les mantras des « communicants » dont le rôle est de nous enfumer toujours plus, de nous détourner du réel.

A refuser de voir le visible, sentir le sensible, nous voici du fond de nos dénis, consentants silencieux au pouvoir de l'absurde.

L’absurde comme une prison à ciel ouvert dont nous sommes les hôtes et les geôliers.


Nous voici donc comme des prisonniers alignant barres gravées sur le mur par paquets de dix, sans savoir quand interviendra la libération.

Ce que nous ne savons pas, c'est que nous possédons les clefs. Mais de tortures psychologiques en menaces d'enfermement pire, nous finissons par oublier détenir la force de notre liberté.

Un mois s'envole emportant avec lui les voeux pieux. Il reste à établir pas à pas les actes de résistance au brouet insipide et stupide qui nous est servi chaque jour.


Xavier Lainé


31 janvier 2021

vendredi 26 février 2021

Sourde colère 38 (Nouveaux états chroniques de poésie - Volume 12 - Tome 1)

 




Agir ou pas ? Embarqués dans l'histoire, désemparés par l'inertie des Etats, faire ou ne pas faire ? Faire et transgresser les règles si nécessaire, ou pas et devenir complice des crimes d'Etat commis en notre nom ?


"Ils roulent mensonges dans leur monde où le mensonge est une parole comme une autre, vaine comme une autre, ça ne touche rien, ça ne fait rien, ça ne nie rien, même." 

(Marie Cosnay/Mathieu Potte-Bonneville, in "Voir venir, Ecrire l'hospitalité, éditions Stock, 2019, Lecture terminée ce matin, trentième jour d'un mois de janvier à l'échine parcourue des mêmes travers, des mêmes cautions silencieuses au glissement vers la dictature sanitaire)


L’heure n’est plus à tergiverser, mais bien à réveiller nos potentiels de création.

Ici et là, on me demande : mais quelles solutions ?

Alors je rêve d’un programme sans programme, je rêve d’un moment où nous serions tous, citoyens tels que nous sommes, les cosignataires du monde qui serait notre.

Que nous pourrions ainsi, du plus local au plus global nous en réapproprier les rouages sans attendre le grand soir ou je ne sais quel homme providentiel qui le ferait à notre place.

Je rêve les yeux ouverts d’une co-construction d’un monde de nouveau vivable pour tous, sans distinction.

Qu’importent les détails, nous savons, chacun, au fond de nous-mêmes ce qu’il nous faudrait pour tout simplement redonner à nos vies le goût de vivre.

Cette pincée de folie qui nous ramènerait à notre soif primaire d’être des bâtisseurs du présent et non simplement des rêveurs d’un avenir inaccessible.

D’autres expériences existent un peu partout dont nous pouvons nous inspirer.

L’heure n’est plus à la résignation mais à la prise de parole et de pouvoir d’une nouvelle jeunesse.


Xavier Lainé


30 janvier 2021 (2)


jeudi 25 février 2021

Sourde colère 37 (Nouveaux états chroniques de poésie - Volume 12 - Tome 1)

 




Il faut savoir sortir des autoroutes, désobéir, suivre des routes et des sentiers buissonniers. 

Que Apple me dise ce que je devrais lire, ou que Facebook me demande ce que je voudrais écrire, que mon libraire mette petit coeur sur ses livres pour guider ma lecture vers ce qui lui convient, qu'il me faille être "coaché" pour vivre comme le monde veut que je vive, voilà qui m'insupporte. 

Je vais comme je veux, je pense comme j'en ai envie, je lis ce qu'il me plaît de lire, j'écris comme je l'entends.

Je n'ai besoin d'aucun "directeur de conscience", juste de butiner auprès de tous et de chacun ce dont ma conscience a besoin pour grandir.


C’est pourquoi je n’adhère plus à rien.

Car adhérer selon les principes adoptés depuis le XIXème siècle, c’est se plier à la règle sans qu’elle soit communément admise.

Qu’importent les querelles de clochers et d’ego, je cherche avec humilité à me fondre dans la décision collective à la condition expresse qu’elle vise au bien commun et non à l’appropriation d’un pouvoir par une minorité prétendue « éclairée ».

L’urgence n’est plus à attendre un grand soir hypothétique, mais bien à agir, chaque jour, pour faire grandir l’idée que notre humanité ne serait pas à sacrifier sur l’autel des égoïsmes capitalistes.

Ce monde est en train de s’éteindre ou du moins de montrer son potentiel destructeur, une fois emballé dans les stratégies du choc propres au libéralisme sans retenue.


Ce que nous ne pouvons dénier tant la fracture apparaît au grand jour, à moins de nier que nous ayons un nez au milieu de nos figures, c’est ce partage en deux classes profondément opposées : une minorité de possédants qui tirent profits y compris de notre impuissance, qui spécule sur nos erreurs de jugement, et nous, qui n’avons que nos intelligences et nos mains.


Xavier Lainé


30 janvier 2021 (1)


mercredi 24 février 2021

Sourde colère 36 (Nouveaux états chroniques de poésie - Volume 12 - Tome 1)

 




Mais peut-être au fond, même de gauche traditionnelle, préférez-vous un bon petit père des peuples qui décide pour vous que vous mobiliser pour inventer le monde de demain.

Vous restez donc sur vos gardes, regardant d’un oeil suspect toute jeunesse impétueuse qui s’invite en vos grand messes.

Peut-être au fond, pour vous autres qui dormez sur vos deux oreilles, convaincus d’être dans le droit chemin d’une pensée qui ne se remet jamais en question, le statu quo d’un monde capitaliste, en mode libéral ou en mode pays de l’Est n’est pas pour vous déranger.

Vous tirerez toujours un « bilan globalement positif » de chaque étape de la vie humaine, du moment qu’elle ne vient pas frapper à votre porte et vous demande de bouger.

Alors, vous signez des pétitions à tour de bras, sur internet et ailleurs, vous faites de joyeuses révolutions sur des réseaux prétendus « sociaux », puis vous éteignez cet écran là pour, depuis votre fauteuil « Voltaire » suivre les informations télévisées.


Même pas voir.

Même pas voir le précipice ouvert devant nos pieds.

Précipice où vont tomber, sans protestation, l’immense majorité des laissés pour compte d’un monde que vous avez quitté en 1917.

Qu’importent les discours coulés dans le moule d’un marxisme bien digéré ?

Marxisme et narcissisme finissent par se rejoindre pour vider le premier de toute substance philosophique.

Le discours parle du commun, mais à la condition qu’il se plie aux fantaisies de Narcisse.

Une fois vidé de toute philosophie, il reste aux pauvres la glu d’un temps sans perspective dont seule une organisation sans structure psycho-rigide peut nous dégager.


Xavier Lainé


28 janvier 2021 (2)


Sourde colère 35 (Nouveaux états chroniques de poésie - Volume 12 - Tome 1)

 




Bien difficile d'y voir clair dans un monde volontairement enfumé : c'est un acte de résistance que de refuser de penser au pas cadencé d'informations manipulées.

Les mots succèdent aux mots.

Les maux s’estompent derrière tension générale.


Que dire encore sinon cette souffrance ajoutée à la souffrance.

Que dire de cette absence.


On ne s’embrasse plus, on ne s’étreind plus.

Que reste-t-il d’humain désormais ?


J’attends dans cette nuit qui s’attarde.

J’attends un signe de révolte.

Il est encore asymptomatique.


Chacun derrière son masque se cache.

Insupportable temps générés par des fous.


J’attends dans cette nuit.

Je cuve ma sourde colère.

Combien de temps encore ?


Le boisseau posé sur le moindre souffle, 

La liberté noyée,

La vie elle-même isolée et violée,

Quel rêve formuler qui sache panser de telles plaies ?


J’attends dans cette nuit qui s’étend.

J’attends un signe de révolte qui tarde à venir.


Xavier Lainé


28 janvier 2021 (1)


lundi 22 février 2021

Sourde colère 34 (Nouveaux états chroniques de poésie - Volume 12 - Tome 1)

 




Il en faut si peu, pour renouer avec nos humanités : une porte ouverte, un thé ou café partagé, une matinée à se causer, de tout et de rien, de ce qui paraîtrait non essentiel ou temps perdu pour les aveuglés et les têtes en ogives, les cerveaux connectés aux algorithmes mais déconnectés de la vie. Il en faut si peu pour que jour retrouve le chemin du soleil !


Et il y en avait du soleil, cette fois-ci.

Nos pensées glissaient sur les ailes du matin.

Oubliant l’heure et le jour, nous cheminions vers d’autres horizons.

Les fâcheux avaient rendu les armes.

Nous nous retrouvions radieux en mêmes lieux mais dans un autre temps.

La jeunesse avait pris son envol, décidant pour elle-même du monde à sa mesure.

Nous étions là, certes, mais à simple titre de témoins d’un temps qui précédait leur naissance, et pour éclairer le chemin parcouru.

Nous retrouvions notre place, celui de l’expérience vécue qui permet d’éviter les récifs.

Nous avions le rôle des poissons pilotes, connaisseurs des passes fragiles où éviter de se blesser.

Nul besoin de dicter le chemin.

Il suit les méandres d’une vie vibrante.

Nous avions mis de côté les drapeaux de troubles identités.

À trop nous accrocher à leur couleur, aux frontières imposées, aux murs montés sans commune raison, nous perdons le fil de nos échanges.

Nos langues, nos cultures pourraient réapprendre l’échange.

Retrouver le goût de se nourrir, les uns les autres, de nos expériences.

Qu’un ou deux se réunissent et se parlent, vraiment, ce n’est pas refaire le monde, c’est déjà l’ébranler dans ses certitudes vaines.

C’est déjà jeter les bases d’une autre chose dont nous connaîtrons les contours qu’au fil de nos chemins.


Xavier Lainé


27 janvier 2021


dimanche 21 février 2021

Sourde colère 33 (Nouveaux états chroniques de poésie - Volume 12 - Tome 1)

 




Depuis si longtemps réduits à des individus interchangeables, malléables, soumis : une fois le fondement du lien détruit, que reste-t-il de notre humanité ?


Que reste-t-il sinon cette soumission à un ordre établi que n’ont droit de contester que ceux qui ont sésame ?


*


Chaque moment de silence est prémisse à contestation et insoumission.

Prendre le temps de voir, est-ce encore autorisé ?

Prendre le temps de nous parler, sans plier sous le joug des injonctions sans fondement, est-ce encore de l’ordre du possible ?


Que des pensées habituées à la contestation plient sous ce couvercle, nous voici dans un consentement à la dictature.

Dictature patente, évidente, puisque nous voici à attendre comme des veaux que son éminence le roitelet de la finance nous disent à quelle sauce nous devrons être cuisinés.


*


On plie ou on casse. Dans un cas comme dans l'autre ce n'est que douleur d'exister. C'est si récent, au fond, cette manière de vivre debout : peut-être n'avons-nous pas fini d'apprendre.

Nous n’avons certainement pas fini d’apprendre.

À moins de considérer l’affaire clause et de demeurer figés, englués dans des pensées arrêtées.

Que nous apprend le passage viral ? Qu’est-ce qui est mis en lumière sous ce jour étrange d’une pandémie qui n’en a que le nom ?


Xavier Lainé


25-26 janvier 2021 (2)


samedi 20 février 2021

Sourde colère 32 (Nouveaux états chroniques de poésie - Volume 12 - Tome 1)

 




Rien n'est perdu à qui sait refuser les discours trop bien ficelé, les certitudes trop bien établies, et se met à penser par lui-même, imaginer le monde qui pourrait être le sien et en partager la substance avec son voisin immédiat, sans attendre d'un sauveur suprême la dérive autoritaire.

Rien n’est perdu mais quelle fatigue il y a à résister !

Quelle fatigue que de douter, de ne pas être certain de sa bonne raison !

Fatigue d’en voir qui arrivent et s’imposent, imposent leur discours, répété à l’envie sans changer la moindre virgule.

Il est temps de rompre.


Il est temps de co-rompre un système lui-même co-rompu.

De s’engouffrer dans la brèche de sa co-rruption et d’inventer notre propre système.

Aucune utopie là-dedans, juste un zeste de rêve et une pincée d’imagination.


*


Je renoue ici avec cette étoile qui scinde les pensées.

Pensées qui vont en archipels de mots et de phrases

Qui ne savent pas d’avance vers quoi elles s’aventurent.

L’important est de leur donner vie dans l’espace d’une page

Dans l’espace des yeux qui s’y déposent  (ou pas)

Mais qu’importe qu’elles soient lues ou pas,

Ce qui compte c’est de laisser voguer l’esprit

Au fill de ses inspirations.


Ne pas réserver l’exercice à ceux qui en font métier.

Garder l’esprit libre de s’imprégner de tout ce qui se pense et s’écrit,

En digérer la substance pour en faire siennes les méandres.

Ici commence la liberté.


Xavier Lainé


25-26 janvier 2021 (1)


vendredi 19 février 2021

Sourde colère 31 (Nouveaux états chroniques de poésie - Volume 12 - Tome 1)

 




À Eliane & Jean (suite 2)


Je n’ai pas quitté le militantisme, je lui ai donné une autre figure : j’estime aussi important de vivre et faire vivre la bulle d’humanité de mon lieu de travail, où viennent se blottir toutes les peines et toutes les misères, puisque je devrai sans doute y oeuvrer jusqu’à mon dernier souffle, que de faire de vibrants discours. 

Mon écriture est là pour creuser cette expérience de vivre en humanité sans attendre qu’un gouvernement, ou un état nous impose sa « vision ».

Chaque jour que je vis est un acte militant par lui-même qui m’invite à réfléchir, douter, approfondir de lectures en lectures, toutes les dimensions de ce mot qui n’a pour le moment aucune définition valable : humain.


"L’animal fait un avec la nature. L’homme fait deux. Pour passer de l’inconscience passive à la conscience interrogative, il a fallu ce schisme, ce divorce, il a fallu cet arrachement. N’est-ce point la frontière justement ? Animal avant l’arrachement, homme après lui ? Des animaux dénaturés, voilà ce que nous sommes. »

Voici ce qu’écrivait, j’y reviens sans cesse, Vercors, en 1952, dans « Les animaux dénaturés ». C’est une question qui devrait nous déranger, nous démanger sans cesse, être posée dans toutes les écoles, tous les lieux où des Hommes sont appelés à travailler ensemble à leur devenir. 

Ce n’est pas une question globale, c’est une question tellement locale qu’elle devrait nous inspirer chacun.


Après le gris d’hier, un soleil froid se lève sur les collines : l’heure d’aller humer un peu l’odeur de la terre après la pluie et avant la neige annoncée pour la nuit prochaine. C’est là que notre minuscule place d’humains dans un univers qui nous dépasse m’invite à penser.

Chaque oeil qui vient me lire, partage, valide ou invalide mon discours me permet d’avancer dans ces questionnements infinis.


Xavier Lainé


24 janvier 2021 (3)


jeudi 18 février 2021

Sourde colère 30 (Nouveaux états chroniques de poésie - Volume 12 - Tome 1)

 




À Eliane & Jean (suite 1)


À tout globaliser, nous avons donné de l’aliment à une globalisation purement inhumaine.

L’humain, ce n’est pas du discours, ça se construit au jour le jour dans un regard, un sourire, une poignée de main, un café partagé dans l’aube délicate : tout ce que la dictature sanitaire tend à supprimer de notre horizon. Ce qui rend la situation intenable et explosive, car, à moins d’accepter de ne plus exister que comme des post-humains, voire même, demain, si nous n’y prenons garde, comme trans-humains augmentés de je ne sais quelles prothèses numériques qui décideront pour nous de ce que nous devons vivre, finira par provoquer, climat aidant, notre propre extinction.


Il m’a été terriblement douloureux d’observer, hélas, pas seulement hier, cette sclérose de « camarades » qui participent, malgré eux de cette extinction du monde vivant.

Les affrontements qui se sont produits étaient à l’opposé des discours tenus. 

Les jeunes présents l’ont bien senti qui ont renversé les tables et décidé de faire la fête plutôt que se noyer dans les sempiternelles jérémiades.


J’ai pris l’habitude de me placer en observateur discret. 

En écrivant un texte de circonstance et en imposant sa lecture, j’ai eu la naïveté de croire que les militants d’hier avaient changé. Je me suis trompé : Ils sont demeurés égaux à eux-mêmes, militants d’un hier dépassé. Mes mots chez eux n’avaient aucun sens. S’ils en ont eu un, c’est avec les jeunes qui étaient là et m’ont remercié.

S’il y a de jeunes cons, hélas, il y en a aussi des vieux. C’est au moins rassurant, tout en étant conscient de l’être toujours un peu, heureusement, de ne pas être enfermé dans cette espèce qui va à notre destruction.


Xavier Lainé


24 janvier 2021 (2)


mercredi 17 février 2021

Sourde colère 29 (Nouveaux états chroniques de poésie - Volume 12 - Tome 1)

 




À Eliane & Jean


N’échouent que ceux qui ne tentent pas de faire : à ce titre, nous devrions féliciter ceux qui ont le courage d’agir. Hier, indéniablement, une personne presque seule a su mobiliser plus largement que le cercle restreint des joyeux retraités militants psalmodiant contre le désenchantement général.


De toute évidence, la jeunesse était là, avec sa fougue et sa brusquerie, avec sa joie de vivre et sa soif de liberté.

Il est dramatique que les quelques « responsables » enkystés, de toutes obédiences, soient incapables d’avoir la sagesse de soutenir l’explosion de jeunesse, et d’entamer le dialogue, comme j’ai tenté de le faire en marge et sous la pluie : les jeunes avec qui j’ai pu parler, sont dans une incompréhension totale de ce qui, historiquement, a pu nous conduire à l’impasse dans laquelle nous nous trouvons tous et qui ne se résume pas à un port ou non de masques, mais à une forme de soumission à une autorité illégitime dans le fond comme dans la forme.

J’ai tenté, dans le brouhaha général, de les inviter à réfléchir à cette histoire immédiate qui se déploie depuis quarante années et qui, de renoncements en aveux d’impuissance a laissé le totalitarisme libéral post-humain prendre le dessus.


Il y aurait là quelque chose à creuser puisque, dans nos courtes vies nous pouvons témoigner de ce que nous avons vécu, en tant que militant, dans l’espace temps réduit de 1980 à 2021, et que, bizarrement, les supposés de « gauche » oublient de questionner.

Pour ma part, ce que j’ai vécu de brimades, répressions, chutes personnelles n’ont pas affaibli la profondeur de mes pensées. J’ai simplement pris de la distance avec une forme de militantisme tellement sûre de son discours qu’il finit par en être ridiculement répétitif et vain.


Xavier Lainé


24 janvier 2021 (1)


mardi 16 février 2021

Sourde colère 28 (Nouveaux états chroniques de poésie - Volume 12 - Tome 1)

 




J'avais rêvé, d'un moment de fête, de paix, de fraternité, même sous la pluie.

J'ai vu : des gens se disputer pour des masques, monopoliser la parole en discours d'un autre siècle, répétés depuis si longtemps que plus personne ne les écoute.

J'ai vu la jeunesse se lever avec une soif de liberté sans pareille.

Je l'ai vue danser sous la pluie, sans plus très bien savoir pourquoi nous étions là.

J'ai bien failli repartir avant même de dire un mot.

Je me suis demandé ce que je faisais là, comme je me demande, chaque jour, ce que je fais dans ce monde qui courbe l'échine et accepte la dictature sanitaire et l'ouverture des camps intérieurs, ceux qui brisent l'âme avant les corps.

Mes mots certes ont tenté de rompre le silence.

Je suis reparti sous la pluie froide, regrettant de les avoir formulés.

Le rouleau compresseur de la pensée unique, inique, est le pire virus qui puisse nous atteindre : il pose des barreaux aux fenêtres du coeur.

Il n'y a plus de bord, ni d'engagement, mais la juxtaposition d'opinions inaudibles et sectaires.

Permanent embarqué dans le doute je regarde avec pitié ce monde qui sombre dans la grisaille des idées du passé sans cesse répétées sans un regard sur l'échec évident.

Dans la guerre des plus riches contre les plus pauvres, il nous faudra l'intelligence et l'ironie de la jeunesse, cette jeunesse qui ne m'appartient plus et me laisse vieux avant d'avoir vécu.

Car pour les vieux de mon espèce, témoin de quarante années de malheur et de régression, il serait temps de rester à notre place de témoins, pour aider ceux qui nous suivent à comprendre, non pour garder le pouvoir d'une parole vaincue d'avance.

La montée brune était contenue dans toutes ces années de soumission. 


Xavier Lainé


23 janvier 2021


lundi 15 février 2021

Sourde colère 27 (Nouveaux états chroniques de poésie - Volume 12 - Tome 1)

 




A tant voir venir l'immonde, on se prend à rêver d'un autre monde.

Aux mots qui disent les maux du siècle, vient s’apposer commentaire : « et toujours sans solution aucune ».

Sans solution aucune pourquoi ?

Quels sont, passants, vos capacités propres à imaginer le monde qui serait enfin le vôtre ?

Le vôtre, pas celui d’une poignée de profiteurs, de corrompus qui le façonnent à leur service !

Qu’attendre d’eux sinon le pire ?

Est-ce dire que de chacun pourrait venir le meilleur pour tous ?

Certainement pas !

Nous ne vivons pas, chacun dans notre « bulle-monde ».

Ce triste spectacle est déjà là, déjà vu : ils y sont dans leur bulle, et nous dans la nôtre, ou plutôt de notre côté, chacun dans la sienne, jalousant celle d’à côté, se méfiant de celle des autres, rejetant qui voudrait empiéter sur chacun la sienne, repoussant celles suspectées nous envahir car différente, parfois pleine d’espérance vite déçue.

Méfiez-vous donc, mauvaises graines au pouvoir, les nôtres, semées en liberté, ont la vigueur de nos rêves.


Comme dirais l’ami Jean Diharsce : « Nous sommes des incorrigibles éternellement trahis. »

C’est dans la nature de notre humanité en tentative de sincérité que de se faire piéger par les dominants.

Si nous avions leur autorité, nous ne serions pas qui nous sommes, nous serions de leur côté.

Sans doute est-ce paradoxe que de vouloir faire triompher une notion qui n’a pas d’existence ni de définition.

Paradoxe et difficulté que les tentations globalisantes et totalitaires aggravent.


Xavier Lainé


22-23-24 janvier 2021


dimanche 14 février 2021

Sourde colère 26 (Nouveaux états chroniques de poésie - Volume 12 - Tome 1)

 





Qu’une minuscule fenêtre s’ouvre qui ferait disparaître l’ogive de notre paysage, voilà qui devrait nous réjouir.

Voilà qui attriste les stratèges et leurs ogives.

Les stratèges aux pensées en forme d’ogives ou de colonnes de chiffres et de dividendes.

La vie : combien de dividendes ?

Ça n’a pas de prix, la vie, ça ne se chiffre pas, ça ne passe pas en pertes et profits d’un monde qui ne cesse de finir.

Chaque vie perdue au nom des ogives, chaque vie noyée, chaque vie discrètement gelée sous un porche, c’est une vie essentielle sacrifiée aux ogives et aux dividendes.


Qu’une fenêtre minuscule s’ouvre signée par des espérances, voilà qui devrait nous réjouir.

Ce serait formidable réjouissance si vous, stratèges élus en hautes atmosphères saturées de chiffres et de dividendes, vous redescendiez sur terre pour nous voir.

Pour nous voir et nous entendre.

Nous avons que nos mots, nos voix et nos mains nues.

Que nos mots, nos voix et nos mains nues pour maintenir la minuscule fenêtre de l’espérance ouverte contre votre acharnement à la refermer.


Nous sommes là.

Nous en sommes las.

Nos cervelles chantent à voix discordantes mais avec tant de recherche d’harmonies nouvelles que vous ne pourriez imaginer, avec vos têtes en ogive, toutes les voies potentielles à gravir pour que nous grandissions encore en humanité.

Il suffit d’une minuscule fenêtre ouverte qui pourrait désarmer vos stratégies boursières, une minuscule fenêtre par où rallumer nos lumières.


Xavier Lainé


21 janvier 2021 (3)



Sourde colère 25 (Nouveaux états chroniques de poésie - Volume 12 - Tome 1)

 




"En réalité, pour la majorité des peuples, le développement a constitué un processus dans lequel l’individu, arraché à son passé et propulsé dans un avenir plein d’incertitude, se retrouve en fin de compte au bas d’une échelle économique qui ne mène nulle part." 

Wade Davis, Pour ne pas disparaître, éditions Albin Michel, 2011


Il y a d’un côté la vie et de l’autre l’ogive.

L’ogive comme une menace, sourde, discrète, dont on ne te parle pas.

Sinon en colonnes de chiffres blindées.

Il y a d’un côté nos vies, et en face l’ogive.

L’ogive comme preuve de cette guerre, sans fin ni traités, que les dividendes mènent à ceux qui n’ont rien.

Ce n’est pas rien que cette guerre.

Cette guerre qui plane d’ogives en ogives, qui demain pourraient nous faire sauter avec la terre qui nous porte.

Cette guerre sans nom qui nous prive et nous saigne avant même d’exploser.


Il y a d’un côté nos vies, multiples, diverses comme nos opinions, comme nos cultures et nos philosophies.

Il y a de l’autre les ogives dirigées vers des ennemis imaginaires : car qui pourrait affirmer que nous aurions des ennemis sur cette terre finie ?

Sur cette terre épuisée de guerres qui ne concernent pas le vivant mais les dividendes.

Cette guerre que des stratèges fomentent au risque de se détruire eux-mêmes.

Cette guerre qui détourne tant de dividendes de nos nécessités impérieuses de vivre, apprendre, nous cultiver, nous soigner.

Toutes choses que les fins stratèges d’un monde fini prétendent « non essentielles ».

Car leurs yeux, les yeux des stratèges, ne voient que colonnes de chiffres.


Xavier Lainé


21 janvier 2021 (2)


vendredi 12 février 2021

Sourde colère 24 (Nouveaux états chroniques de poésie - Volume 12 - Tome 1)

 




"Quand tu abandonnes la lutte, tout est fini. Les jeunes aujourd’hui sont perdus. Ils demandent : « qu’est-ce qu’on peut faire ? » Les apôtres ne se demandaient pas ce qu’ils pouvaient faire, ils y allaient."

Tony Gatlif, « Rencontre entre des hommes remarquables », Cassandre/Horschamp, n°87, automne 2011


Chaque jour de mon métier, je passe mon temps à tenter de mettre un peu de rationalité dans tout ça. Pour que mes patients, justement, en finissent avec l'angoisse et la peur, si mauvaises pour leur immunité.

Mon petit plaisir, c'était un petit café en terrasse, le mardi matin et le samedi matin, ou une bière au soleil en regardant vivre la ville, c'était mon moment musique au conservatoire, le jeudi soir.

Tout ça est bel et bien fini depuis le mois de mars, et je n'entends plus que gens qui me disent qu'ils n'en peuvent plus. Je travaille, je travaille, sans pouvoir dire "vous verrez demain ce sera mieux", ce qui serait un mensonge, puisque chaque semaine on nous annonce le pire.

Je ne peux pas dire que je déprime, non, ou alors, comment je ferais avec ceux qui viennent et parfois s'effondrent en larme sur ma table ?

Je suis kinésithérapeute, mais ce qui m'intéresse, ce n'est pas mon chiffre d'affaire, ce sont les gens qui viennent me voir et qui souffrent clairement dans leur corps d'un monde qui ne semble plus savoir ce que c'est que le vivant.

Je suis kinésithérapeute. Je dois me contenter de faire mon travail avec un revenu qui ne cesse de baisser parce que je refuse de multiplier les actes et de négliger les vies qui défilent entre mes mains.

Et en plus, les maigres plaisirs d'une vie humaine me sont désormais refusé. Je dois traverser une ville morte, peuplée de fantômes masqués, une ville qui me flanque des cauchemars la nuit.

Comme si cette nuit ne devait jamais finir.

Pourtant ne rien abandonner des luttes nécessaires pour que vive la vie.


Xavier Lainé


21 janvier 2021 (1)


jeudi 11 février 2021

Sourde colère 23 (Nouveaux états chroniques de poésie - Volume 12 - Tome 1)

 




"Trop d’allégresse annonce souvent de prochaines intempéries. A force de jubiler, nous ne voyions pas que nous n’étions devenus nos propres maîtres que sur le papier."

Alain Mabanckou, Le sanglot de l’homme noir, éditions Fayard, Points, 2012


Bien sur, jubiler à la première courte victoire, danser et chanter avec ce goût joyeux dans la bouche enfin sereine. Mais, si, jalousement, nous ne gardons pas un oeil sur et le souvenir ardent des luttes du passé nos victoires demeurent fragiles, toujours.

Nous ne savons pas ce que chaque empiètement sur les fortunes mal placées génère de frustration chez l’ennemi de classe.

Pardon de parler ainsi,  et de l’écrire mais je répète : le cerveau de l’ennemi de classe n’est pas tout à fait formaté comme le nôtre.

Il ne cesse de calculer pour que profit s’ajoute à profit déjà là.

Qu’une seule parcelle de fortune soit enlevée pour être redistribuée, voilà l’outrage !

Où, naïfs, nous plaçons vains espoirs, eux capitalisent.

Nos mondes sont rigoureusement des mondes parallèles et sans communication possible.

Où tu calcule au centime près ta monnaie pour acheter ton pain, ils ajoutent à tes centimes des milliers de zéros à t’en flanquer le vertige et hésitent entre la voiture et le yacht de luxe.

Deux mondes parallèles mais dépendants.

La dépendance n’est pas du côté qu’on croit : où le pauvre apprend de haute lutte à survivre avec peu et donc à façonner un monde à sa dimension, le fortuné de bonne bourgeoisie, spéculant sur la dette des pauvres, a besoin d’eux pour s’enrichir toujours plus.

Ce que ne voient pas les pauvres, non par bêtise, mais par préoccupation à survivre dans le monde tordu imposé par les plus riches. Un monde où l’avenir est une ombre, certes, mais où, tous ensemble, nous pourrions rallumer les lumières.


Xavier Lainé


20 janvier 2021


mercredi 10 février 2021

Sourde colère 22 (Nouveaux états chroniques de poésie - Volume 12 - Tome 1)

 




"En imaginant les contours d’un monde dont l’Economie serait devenue l’unique religion, les fondateurs de la doctrine capitaliste ne pouvaient que légitimer par avance le projet d’étendre à la culture et au divertissement eux-mêmes les principes implacables de la rationalité marchande."

Jean-Claude Michéa, Impasse Adam Smith, éditions Climats, 2002


Il nous faudrait un palan pour soulever nos paupières lourdes de fatigue.

Chaque jour nous amène son lot d’infâmes décisions.

Quelle souplesse dans nos échines !

Car nous plions, n’est-ce pas ?

Nous plions.


Le seul horizon ouvert rode en arrière-plan d’écrans sans âme.

Nos richesses, non essentielles aux yeux des gestionnaires, attendent un improbable printemps.

Pour le moment, elles grelottent, transies, sous le froid vent soufflé d’une Sibérie de l’être.


Il faudrait fédérer nos colères pour qu’elles éclosent au grand jour.

Nous ne savons pas comment faire, tant les murs insensés nous séparent.

Alors nous attendons l’improbable moment.

Nous en rêvons pourtant de cette élévation de l’âme lorsque nos voix d’abord discordantes finissent par trouver l’harmonie d’un futur libéré.

Nous en rêvons de ce chant qui nous est commun, vital, indispensable quoique maintenu sous le couvercle absurde de leurs rentabilités.

Nous savons, mais ils vont jusqu’à marchander nos connaissances, nous vendre nos propres vies que nous rachetons à crédit.

Ils spéculent même sur nos faillites.

Leurs algorithmes sont les timbales qui rythment nos efforts de galériens pour avancer dans les brumes opaques de vies affaissées.


Xavier Lainé


19 janvier 2021