lundi 31 juillet 2023

Beauté : figure de proue de nos révoltes 8

 



Photographie : XL-Manifestation 26 mai 2016



Ma ville est un mystère

J’y vis en retrait

Ne la sillonne que très peu

Mais il semble que

Dès ma sortie

Mes connaissances s’y donne 

Rendez-vous sur mon chemin


Ma ville est un mystère

Plus je m’y enterre

Plus on me dit connu

Mais pour quoi et comment

Nul ne sait me l’expliquer

Je ne sais qu’y être de passage

Me dis que je pourrais

Être ailleurs dans une autre vie


Ma ville déploie 

Des réseaux souterrains

Où des choses se disent 

Loin de mes oreilles 

Qui ne souhaitent rien entendre

Des histoires racontées

Qui sont sans doute si loin

De toute réalité vécue


Ma ville a par en-dessous

Un réseau de caves 

Par où autrefois

Couraient vite les nouvelles

Comme les humains furtifs

Clandestins invisibles

Façonnant les vies de demain

Défaisant celles des occupants

Qui ne comprenaient rien

À ce maquis secret


Je vis en ville mystère

N’ai besoin d’aucun souterrain 

Pour me cacher n’ayant rien de secret

Sinon ma volonté d’être en retrait

Pour mieux « sentir » le monde

Et son étrange tournure


Pourquoi tant de gens 

Se disent d’accord avec mon propos

Sans que rien ne change

Au quotidien blafard

Des exclus 

Des détenus

Des discriminés


Pourquoi ?



Xavier Lainé

  8 juillet 2023


dimanche 30 juillet 2023

Beauté : figure de proue de nos révoltes 7

 



Photographie : XL-Manifestation 26 mai 2016



Si dure la vieillesse 

Et la solitude qui l’accompagne

Si dure


Si dure en ce monde

Non conçu pour accueillir

Mais toujours parquer

Ghéttoïser 


Si dure la vieillesse

À qui ne s’y est pas préparé

Dans l’illusion de toute puissance

De sciences poussées à l’absurde


Savez-vous la douleur

Qu’engendre les pleurs de mère

Parvenue si loin dans le temps

Que souffrir encore un jour

Lui semble inacceptable


Inacceptable la souffrance

Inacceptable l’idée de mourir

Tout en réclamant le terme

Sans trop savoir comment faire

Comment vivre encore

Lorsque tout se délite

En un monde dépourvu 

De l’humanité nécessaire


Si dure la vieillesse

Si dure la peine

Si dure


*


Mes larmes

Mes larmes

Pour les enfants perdus

De République aux abois

Enfants de la misère

Un temps confiés

Puis repris

Trimbalés de-ci

Trimbalés de-là

Mais toujours perdus


Que valent mes larmes

Après avoir du jouer

À corps défendant 

Les pères Fouettard

Histoire de les aider

À grandir autrement

Qu’en illusion de facilité 

Que valent les larmes d’un père

Ce qu’on lui demande

C’est d’être dur et imperturbable


*


Ce qu’on demande de dureté

En siècle de recul et d’ignorance

Hors du fragile équilibre entre 

Autorité et bonté d’âme

Ici se loge la compréhension



Xavier Lainé

7 juillet 2023


samedi 29 juillet 2023

Beauté : figure de proue de nos révoltes 6

 



Photographie : XL-Manifestation 26 mai 2016




Bien sûr l’été

Le ballet des hirondelles (des martinets)

Les moineaux qui s’appellent

De gouttières en buissons


Bien sûr l’été

Les mains tendues dans la rue Grande

Tout ce qui ne se voit

Caché dans des poches de misère


Bien sûr l’été

Désolé de vous gâcher la perspective

Mais pas le temps d’une chaise longue

Elle dort au fond de la cave

Comme tant d’autres objets inutiles


Bien sûr l’été

C’est gentil de me souhaiter

« Bonnes vacances »

Alors que comme des milliers d’autres

J’en ai oublié les délices


Bien sûr l’été

Me sens moins seul

Sans comparaison aucune

Entre mon grenier littéraire

Et les tristes immeubles

De banlieues désoeuvrées


Bien sûr l’été

Âpre et dur été

Pour les enfants privés 

Du bonheur de respirer

Ailleurs que dans le quotidien 


Bien sûr l’été

Comme une blessure

Au souvenir de ce qui fut

De naïve liberté 

Sur les sentiers escarpés

Dans l’ivresse des cimes


Bien sûr l’été

Qui n’est plus que souvenir

De ce qui a été ruiné

Lacéré

Détruit

Tandis qu’ils vont

Suggérant d’interdire

Les derniers lieux virtuels

Où se logent quelques mots assoiffés


Bien sûr l’été

Un président s’en vient

Casser le thermomètre

Pour que nous ne sachions pas

Le degré de cuisson

Des grenouilles que nous sommes

À ses yeux aveuglés

De pouvoir et de fortune



Xavier Lainé

6 juillet 2023