mercredi 3 janvier 2024

Une aube se lève derrière les barreaux 11

 




Tous les jours je reçois et ouvre mon journal

Tous les jours mon journal parle 

Il parle d’un monde qui n’est pas le mien

Les gens qui le fabriquent

Ceux qui y écrivent

Vivraient-ils sur une autre planète

Que je n’en serais pas surpris


Tous les jours je reçois et lis mon journal

Il en dit des choses mon journal

Mais rien qui concerne ma vie quotidienne

Celle que je partage avec tant qui poussent ma porte

Celle qui se bat pour survivre 

Quand toujours tout nous enfonce


Tous les jours j’ouvre et je lis mon journal

Avec cet étrange sentiment qui ne cesse de grandir

De lire les nouvelles d’un monde

Qui ne me concerne pas

Qui ne dit mot des difficultés à vivre encore

Qui se répand en perspectives qui ne me toucheront guère

Sinon qu’à l’expérience je sais qu’au contraire

Mon quotidien dont mon journal ne parle pas

Sera tous les jours un peu plus dur

Loin des bruits de leurs fêtes et de leurs guerres


Tous les jours j’ouvre mon journal et je le referme

Je ne sais ce que j’ai lu sinon l’écho d’un monde

Qui n’est jamais le mien

Ni celui de toutes celles et ceux

Qui tentent chaque jour de joindre deux bouts

Qui ne cessent de s’éloigner


*


"Ne demande jamais ton chemin à quelqu'un qui le connaît, car tu ne pourrais pas t'égarer!" Rabbi Nahman, cité par Marc-Alain Ouaknin, Mystère de la Kabbale


Ne me dites pas vers où diriger mes pas

Ils sont trop habitués à suivre leur propre chemin

Parfois au risque de ne savoir où sera l’ultime port


Ne me montrez jamais le chemin de votre droiture

Le mien serpente comme ruisseau sous les mousses

À l’abris d’un temps de désespérance


Mon chemin se noie dans les yeux d’enfants agonisants

En terre dite sainte désormais souillée pour toutes générations

Mon chemin est tissé de ce sang répandu où mon âme s’égare


Ne me dites pas vers où aller

Je préfère me perdre en prenant par la main

La foule immense des déshérités

Des dépossédés


Sachez-le

Vous qui croyez détenir la vérité

Jamais je ne plierai sous votre joug

Ni suivrai la pente sinistre de vos calculs


Je dis que mon chemin pleure

Dans les yeux d’un enfant mort à Gaza 

Sous les coups de tyrans qui ne savent plus ce qu’ils font

Souillant la religion qu’ils prétendent défendre



Xavier Lainé

11 décembre 2023


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire