« En disant que c'était une voix nue, pour rendre compte de la tension aiguë dans laquelle elle me cloua sur place, il me semble que je devais mettre l'accent sur tout ce que le mot évoque très concrètement d'émoi soudain et de première alerte sensuelle : la voix était aussi — il était même singulier qu'on en doutât aussi peu sur d'aussi légers indices — celle d'une femme dévêtue, très exactement, d'une femme désœuvrée, l'esprit encore à peine en rumeur, qui vaque sans hâte à sa toilette. » Julien Gracq, La maison
C’est parfois un simple souffle
Qui porte une voix
Un sourire qui s’épanouit
Sur un visage inconnu
Un moment de douceur
Partagé devant une bière
C’est parfois ce simple souffle
Qui te fait aimer
Être en vie pour encore un jour
Ou plus si affinité
Ce mot glissé en douce
Qui est signe de reconnaissance
C’est parfois ce petit souffle
Qui vient à ta rencontre
Alors que tu n’attends plus rien
Tant les tempêtes t’emportent
Te laissant vague à l’âme
Sur les rives détruites
C’est à cet endroit
Que les regards se croisent
Et se reconnaissent
*
« Seule une humiliation sans nom peut générer la barbarie inédite qui nous menace, et qui trop souvent nous atteint. Tel est le tragique ultracontemporain. » Olivier Abel, De l’humiliation
Est humiliante toute situation qui nous place devant notre impuissance.
Impuissance à changer le monde ne serait-ce que partiellement.
Impuissance à faire entendre nos suppliques.
Est humiliante une journée qui te vois te battre contre l’absurde.
Contre l’absurdité d’un temps qui ne croit plus ni au vivant ni en l’humain.
Contre l’absurdité qui ne fait confiance qu’en des automatisme algorithmiques.
C’est humiliant d’être incité, pour des principes d’économie qui n’ont rien à voir avec la santé publique, à réduire tes « cotations » donc ta disponibilité.
Car à quoi peut encore se rendre utile celui qui passe ses nuits à chercher comment encore joindre les deux bouts malgré un planning qui ne désemplit pas ?
C’est humiliant de vivre dans une société qui sans cesse te surveille.
Qui sans cesse te verbalise et te sermonne quand ses propres édiles se comportent en véritables mafieux.
C’est humiliant de devoir rendre des comptes à des administratifs qui ne savent rien de la douleur, rien de la souffrance, ni des pleurs d’humiliation.
C’est humiliant et à force ça te met dans la tête qu’après tout, si l’explosion de violence émerge, elle pourrait soulever le couvercle de cette humiliation permanente.
C’est humiliant d’être résolument non violent et d’avoir ces pensées qui te viennent devant l’absurde réalité d’un monde sans humanité.
Xavier Lainé
8 décembre 2023
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