Mais peut-être faudra-t-il offrir au monde une page blanche.
Une page de silence.
Une page muette de sidération.
« Il n’y aura pas de cessez-le-feu »
Il n’y aura pas
Cadeau sur la tête des enfants et des femmes
Cadeau de terreur au jour d’halloween
Ici ils vont quêter bonbons
Les enfants de la sainte consommation
Une religion comme une autre
Qui anesthésie autant qu’une autre
On joue à se faire peur
On ne dit rien de la terreur là
Pas si loin
Jusqu’au jour où
Car qui pourrait imaginer que l’horreur puisse s’arrêter
Un 31 octobre noyé dans le sang et les larmes
Qui pourrait prédire
Misère et rancoeur répandues comme lisier
Sur le terreau fertile d’humains invités à ne plus penser
Plus se penser
Plus se projeter
Je dis qu’on meurt à Gaza
Je dis qu’on meurt en Ukraine
Je dis qu’on meurt au haut Karabagh
Je dis qu’on meurt en Turquie
Je dis qu’on meurt en Syrie
Je dis qu’on meurt en Iran
Je dis qu’on meurt innocent un peu partout
Dans le silence de ma page qui
Si elle devait demeurer blanche
Serait alors complice de ces morts innocentes
Pourrai-je encore écrire demain
Saurai-je passer à autre chose
Que l’ignoble qui poursuit son oeuvre
Devant ma porte
Mes antennes cérébrales dressées vers le monde
Mes nuits se font cauchemar
Que seules saines lectures peuvent calmer
Je dis qu’on meurt
Simplement parce que je ne voudrais pas
Qu’à force d’indifférence
On finisse par mourrir ici aussi
Sous le poignard encouragé
Par l’extension du domaine de la misère
Il semble que les puissants n’aient qu’une ligne d’horizon
Celui de la croissance infinie de leurs capitaux
Ces bouffis font ventre de tout
De la faim comme du crime
Ils lèvent un doigt indigné
Lorsqu’un misérable passe à l’acte
Ivre de haine et de rancoeur
Mais jamais ne s’interrogent
Sur le système qui arme le bras vengeur
Puis ils vont
Les bouffis de fortune
Faire la morale à ceux qu’ils ne cessent d’appauvrir
Et se rangent du côté de leurs semblables
À l’extrême droite d’un échiquier dont ils éliminent les gêneurs
Nous en sommes là
En ces temps de tragédies répétées
Comme une résurgence du pire déjà vécu
On s’indigne avec raison des étoiles de David sur les murs
On s’indigne bien peu de la crainte aux ventres musulmans
On brandit les religions comme preuve des pires exactions
C’est pour faire oublier que le pire est d’avoir faim
Et de ne pouvoir se nourrir
On oublie
Tandis qu’on se dresse derrière des frontières dont tout le monde sait
Qu’elles ne sont que cloisons fictives ne protégeant de rien
Sinon ceux qui s’isolent derrière les barbelés du désespoir
Et revendiquent la propriété d’une Terre qui appartient à tous
Dans ma nuit je vois des larmes d’enfants
Je vois et je me lève
J’entends le bruit assourdissant des immeubles qui s’effondrent
Dans un fracas qui couvre les cris qu’ils enterrent
Je vois et j’entends
Mon cerveau cogne aux parois de mon crâne
Je voudrais moi aussi crier dans le noir
Me lever et arrêter les bras assassins
Mes rêves se heurtent à ce monde en loque
Sous le rire malsain de ceux qui s’y engraissent
Mes rêves sont blessés comme mon humanité
Je ne sais comment demain ouvrir une nouvelle page
Qui saurait cicatriser mes blessures
Xavier Lainé
31 octobre 2023
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