lundi 12 juillet 2021

Peindre dans l’air du temps (trilogie) Tome 1 - Théodore entre deux temps 3

 



Le baiser - Théodore Géricault




Que réserve la vie à celui qui en est épris ?

Théodore n’en sait rien et moi non plus.

On vit, parfois emporté comme fétu dans le mouvement de l’histoire.

Ou on attend dans l’ombre que son immobilité soit rompue.


On attend, on s’inquiète de ne rien voir venir.

Il en était sans doute ainsi bien avant sa naissance.

Lui est venu dans la tourmente : la révolution n’avait que deux ans.

Nous en étions aux balbutiements, aux hésitations entre l’ancien monde et le nouveau.

Les aristocrates n’avaient pas encore lâché le morceau.

Les bourgeois s’appuyant sur un peuple affamé n’avaient pas encore succédé aux précédents.

Théodore est venu dans ce monde là : un monde pas encore tout à fait né.

C’était encore une grande mêlée dont nul ne savait de quoi elle allait accoucher.

La Bastille tombée : qu’en sut Théodore en ses premiers soupirs ?


C’est dur un berceau tissé d’incertitudes.

Le vieux monde d’apparence immuable, les fortunes construites sur la domination et le servage n’avaient pas encore rendu l’âme.

La rendraient-elles un jour ?

Il faudrait être devin ou artiste pour le savoir.

Le mouvement des âmes, les transmigrations d’un monde à un autre fomentent parfois de bien étranges destinées.

Un souffle de révolution se penchait sur le berceau incertain de Théodore.

Nul ne sait, en l’heure de sa naissance, vers quoi le monde tendrait.

Et le monde retenait son souffle devant cette tempête qui avait déjà soufflé ailleurs et qui atteignait les rivages de l’Europe par les côtes les plus rebelles et intempestives qui soient.


Xavier Lainé


3 juillet 2021



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