lundi 4 décembre 2023

Si étroit est le chemin 11

 




« Je ne peux pas oublier la guerre. Je le voudrais. Je passe des fois deux jours ou trois sans y penser et brusquement, je la revois, je la sens, je l'entends, je la subis encore. Et j'ai peur. Ce soir est la fin d'un beau jour de juillet. La plaine sous moi est devenue toute rousse. On va couper les blés. L'air, le ciel, la terre sont immobiles et calmes. Vingt ans ont passé. Et depuis vingt ans, malgré la vie, les douleurs et les bonheurs, je ne me suis lavé de la guerre. L'horreur de ces quatre ans est toujours en moi. Je porte la marque. Tous les survivants en portent la marque. » Jean Giono, Refus d’obéissance


Et pourtant ça dure

Ça se poursuit

Ça nous colle aux basques

Toujours ça se répète

Bien que nous disions

« Quelle connerie la guerre »


Et pourtant ça dure

Ça se reproduit à l’infini

En longs cortèges de misères

Fleuves de sang et de boue

Cris en écho tout autour de la terre

Bien que nous disions

« Plus jamais ça »


Ça dure

Ça se poursuit

Il s’en trouve toujours

Tenant pouvoir de main ferme

Pour jouer les boute-feux

Répandre toujours les larmes


C’est là

Avec les blessures et les morts

Qui ne peuvent plus rien dire

Sinon nous rappeler

Qu’il serait temps

De nous réveiller

De ne plus laisser notre sort

Entre mains sanglantes

De pouvoirs usurpés


Je suis de la génération

Qui ici du moins

N’aura pas connu

L’espace d’une vie

Les horreurs de la guerre

N’en ayant reçu 

Que les tristes récits

Pourtant me sens meurtri

À chaque corps tombé

Sous les ruines 

À chaque enfant blessé

Comme « dommages collatéraux »

De conflits non souhaités


Ça dure

Ça se reproduit sous nos yeux

Certes pas devant nos portes

Ou sur le toit de nos maisons

Alors certains s’en vont

Avec la certitude que plus jamais

Tandis qu’à chaque humain

Qui décède sous les coups 

Qui disparaît sous les bombes

C’est toute l’humanité qui saigne

Qui chancelle



Xavier Lainé

11 novembre 2023


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