Comment dire
Sans être méprisant
Comment dire
Je me demande
J’ai peur
D’être condescendant
Parfois
Quand
Sur France Culture
S’éternise un entretien
Dont le propos suit
Étranges méandres
D’un esprit sans
D’une parole sans
Un « moi-je moi-je »
Qui tient un discours
Qui n’apporte rien
Déconnecté d’un réel
Dont visiblement il se fout
Je me demande
Comment l’inculture
Se fait culture
En ce monde sans
Relire
« L’homme sans qualité »
Juste pour voir
*
Alors j’ai éteint la radio
Me suis isolé pour ne plus rien entendre
Des litanies d’un monde qui ne sait
Ni où il va
Ni ce qu’il fait
J’ai éteint
Pour me mettre hors de portée
Puisque ce qui se montre
N’est jamais que nombril
De l’un ou de l’autre
Mais nombril
Et chacun va
Tournant autour de lui-même
Sans la spiritualité des derviches
Le nuit fut si courte
Peut-être la fatigue me rend
Plus sensible à l’absurde
Plus perméable à l’ignoble
À cet art de parler de tout et de rien
Pour éviter de causer de ce qui est
Une violence d’Etat
Une violence économique
Une violence sociale
Mais
Chut
Ne surtout rien en dire
C’est l’été
Vous comprenez
C’est l’été
Je prends le baiser de la beauté
Qui brandit son espoir
À la proue de mes révoltes
Je prends
Je ferme les yeux
Le bruit de la circulation
Indifférent à la défaite climatique
Me parvient encore
Absurde
Je reviens à notre conversation d’hier
Comme à celle d’avant-hier
Où je disais que la première violence
C’est celle d’un gouvernement contre le peuple
Encore et toujours
Depuis presque toujours
Où je disais ce qu’il ne faut pas dire
Et encore moins écrire
À moins de faire une croix
Sur les lecteurs égarés
Les potentiels ouvrages
Livrés au commerce imbécile
Je reviens
Je m’en vais
J’expose ma lassitude dans le flot des mots
Je me noie comme tant d’autres
Sinon que ma vie n’est pas en danger
Dans cette noyade symbolique
Je voudrais pouvoir dormir
Me réveiller devant le sourire complice
De ma beauté toujours à la proue
Elle m’aurait fait oublier
Ma lassitude d’avoir traversé
L’océan du temps
Cramponné au frêle esquif
D’un espoir toujours vain
Où se niche la violence essentielle
Mots délivrés en vain
Eux aussi
Puisque toujours le couvercle retombe
Sur le plus grand nombre
*
Puis les mots viennent
Font trois petits tours
Et puis s’en vont
Comme les heures
Les journées
Les saisons
Imperturbables
Elles s’en viennent
Et s’en vont
Moi, je continuerai à suivre
La beauté comme figure de proue
À la tête de nos révoltes
Infiniment justifiées
Xavier Lainé
31 juillet 2023
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