Alors je ne quitterai pas le limon des mots
Car ils sont de ce seul fait
Les ferments de toutes formes de vies
Je ne quitterai pas les sous-sols de ce temps
Qui vogue de vaines gloires en triomphes scandaleux
Au nom de l’individu roi persuadé de sa raison
Je ne quitterai pas cette zone de retrait
Loin de la surface où se chamaille le gratin
Les âpres au gain
Les obsédés de leur nombril
Bien mieux à faire
Quand il me faut ne jamais perdre de vue la beauté
Qui se tient bien droite à la proue de mon rafiot
De mon radeau de livres
Où errent mes pensées
Entre les pages semées de mains divines
Je ne quitterai pas mon refuge
Je ne demanderai aucun secours
Aucune aide
Tant de ce fond là
On n’attend rien d’autre
Que le geste spontané
Qui nous tisse une âme commune
Dans ce limon de mots
Viennent nicher les sirènes de l’espérance
Elles me prennent par la main
Me tirent sur la grève
Avant la noyade
D’un baiser tendre
Elles me ramènent à la vie
Où d’autres mots mènent leur danse
Jusqu’au crépuscule de la vie
Je n’ai d’autre nourriture que cette beauté là
Celle qui passe inaperçue
Sur les trottoirs d’un monde aveuglé
De suffisance
De fausse gloire
D’espèces sonnantes et trébuchantes
« Trébuchantes »
C’est en effet bien le mot
La gloire d’être visible à la surface
Se repaît de tous ceux qui
Dans une vie non souhaitée
Trébuchent
La fortune des uns est construite sur la misère des autres
Qu’importe la liste sanglante ou humide
Des morts au champ d’horreur
Des noyés dans l’immonde
Mes mots demeurent au fond
Ils ne revendiquent rien d’autre
Que de suivre leur chemin de silence
Ils m’invitent au voyage intérieur
Pour ne pas sombrer avec les autres
Xavier Lainé
29 juillet 2023
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