jeudi 17 octobre 2024

À vue d'oiseau 21

 





L’oiseau anthropologue s’est bel et bien envolé

Vers d’autres cieux plus cléments sans doute

A-t-il accompli sa grande migration


Me voilà devant ce vide

Le ciel roule des nuées noires

L’automne s’avance sans masque


En d’autres lieux qui se croient de gouvernance

On fomente le pire à l’abri du pouvoir

Le déni de la parole commune

Ne s’est jamais si bien porté


Que ne feraient-ils pas

Les bonimenteurs abreuvés de finance

Pour conserver leurs fortunes mal acquises


Ils s’assoient sur toutes velléités de contestation

Brisant dans l’oeuf toute révolte

Ils ne savent qu’interdire

Brider

Emprisonner


Pauvres gens qui espéraient encore

Que « démocratie » saurait vous protéger

Nous voilà gros Jean comme devant


Même plus la moindre larme

Les siècles passent

L’esprit de domination demeure



Xavier Lainé

22 septembre 2024


mercredi 16 octobre 2024

À vue d'oiseau 20

 





Avec leur émissaire

Il semble que tous les oiseaux aient décidé de se taire

Il s’ensuit un profond silence

Interrompu par l’agitation humaine


Je voudrais m’en amuser

Trouver joie derrière ce trafic incessant

Je n’y arrive pas

C’est comme si une fuite permanente  s’était installée

Mais pour fuir quoi

Pour vivre en quel déni

Je l’ignore


Je cherche désespérément le pépiement sur ma génoise

Mes yeux sillonnent le ciel

Ne rencontre que le bleu lavé d’un vent qui souffle en rafales


Mes oreilles bourdonnent du silence tissé d’indifférence

Qui semble accompagner nos pas d’humanité perdue


Car un cri d’enfant déchiré par les bombes

C’est un coup de poignard en mon coeur de père


Une femme violée et étranglée

Ce sont larmes de deuil sur mes souvenirs amoureux


Où donner de la tête en ces temps d’infortune

Vers où diriger nos mots pour sortir de cette tragédie quotidienne

Où trouver refuge quand il semble que gens de pouvoirs

Ne connaissent aucune limite à leurs infamies



Xavier Lainé

21 septembre 2024


mardi 15 octobre 2024

À vue d'oiseau 19

 





Mon bel oiseau multicolore

Mon observateur attentif des habitudes humaines

Semble s’éloigner chaque jour un peu plus

Il m’a laissé sa plume entre les mains

Mais je suis gourd à la manier en son absence

Je ne peux qu’accrocher aux branches du marronnier d’en face

Mes rêves qui seuls savent le rejoindre 

L’entendre et comprendre son langage


J’ai peine à quitter le territoire ouvert de ses mots

Ouvert sur nos maux qui comme glu nous collent à la peau

J’ai cru voir mon oiseau lui-même englué

D’une marée noire soudaine dans des orages apocalyptiques

Des coulées de boue en emportait le souvenir

Et moi je restais sur la rive un peu abasourdi

De voir arriver à grand fracas ce qui était si prévisible


D’un peu partout ce que mon bel oiseau multicolore avait senti

Montait les sourdes plaintes des opprimés blessés

On ne pouvait désormais plus être sûr de rien

Tant les obscurs au pouvoir savaient manipuler leurs technologies

En les détournant à des fins nauséabondes et assassines

Eux qui stigmatisaient comme terroriste leurs opposants

Se mettaient à leur tour à user et abuser de leurs pouvoirs criminels

Tuant à l’aveugle toute vie autour de leur camp retranché


Mon oiseau s’est tu devant l’horreur absolue

Dont mes congénères se rendirent capables

Je l’écris au passé car c’était hier que notre monde a basculé 

Dans le vide abyssal de sa non-humanité



Xavier Lainé

20 septembre 2024


lundi 14 octobre 2024

À vue d'oiseau 18

 





Petite mise au point du plumitif de service


J’étais un peu surpris

Le premier jour

Devant cet oiseau multicolore

Posé sur le fil devant ma fenêtre

Je l’entendais s’égosiller

Me demandais ce qu’il me voulait


Jour après jour il est revenu

Lorsque la fenêtre était fermée

Il tapait au carreau

Je n’avais aucun moyen de traduction

Depuis le langage volatile

Alors je restais là à l’écouter


Peu à peu ce fut comme si sa langue

Se mettait à glisser sous mes doigts

Il me prêta une de ses plumes

Qui se mit à glisser sur le papier

Me racontant son histoire

D’oiseau anthropologue

Que son espèce avait mandaté

Pour tenter de comprendre

Les comportements de plus en plus étranges

De mes frères et soeurs humains


Je me prêtais volontiers au jeu

Riant du bon tour que ce regard allait jouer

À mon espèce triomphante et ignorante de sa fragilité



Xavier Lainé

19 septembre 2024


dimanche 13 octobre 2024

À vue d'oiseau 17

 





C’est un étrange comportement que le vôtre

Vous ne cessez de clamer la nécessité d’aller vite

D’en faire toujours plus en moins de temps

Vous causez de « rentabilité » de « productivité »

Mais chaque jour je survole vos files interminables

Vous y faites preuve d’une patience admirable

Mais je vous assure qu’avec mes deux ailes

Je vais bien plus vite que vous d’un point A à un point B

Sans parler des contraintes qui semblent être les vôtres

Contraintes que mon espèce volatile ne connaît pas

Du moins pas celles qui vous poussent à vous précipiter

Toutes sirènes hurlantes pour ne pas être en retard

Ce qui semble inévitable


Moi l’oiseau anthropologue

Je ne cesse de me poser des questions

Sur vos étranges migrations

Qui vous mènent de zones densément peuplées

En zones « touristiques » équivalentes

Sauf la mer ou la montagne à portée de balcon


Nous autres volatiles

Lorsque fatigue nous prend

Nous nous blottissons au fond du nid

Dans l’attente de jours meilleurs

Lorsque tel est le cas

Nous préparons activement les redoutables saisons

Où le froid envahit tout jusqu’en dessous de nos plumes

Ou celles encore pire où la chaleur nous laisse assoiffés

Une fois les rivières desséchées par vos soins



Xavier Lainé

18 septembre 2024


samedi 12 octobre 2024

À vue d'oiseau 16

 





Mais voilà que mon prête-plume s’est mis en grève

Qu’il s’est inscrit aux abonnés absent de la page

Il s’en est suivi un long silence d’une journée

Elle m’est apparue sans fin


Que puis-je noter/observer sinon cette pléthore

Vous êtes si nombreux et vivez dans un bruit permanent

Il ne reste que fort peu d’espace pour nos chuchotement ailés

Je me noie dans cette exubérance

Comme vous sans doute

Au point de ne savoir comment vous en extraire

Rejoindre le silence qui n’en est pas un

Mais qui fait que nature en est une


Je vous suis devant vos écoles

Vous y déposez vos enfants

Parfois comme un paquet confié au portail automatique

Parfois avec un serrement de coeur

Je vous vois déposer un baiser tendre sur la joue qui s’enfuit

Comme nous vous avez tant à apprendre

Sinon que vos apprentissages durent bien plus longtemps

Que vous n’arrivez adultes que très tard

En vrai il semble qu’on puisse dire

Que vous naissez fortement prématurés

Tandis que notre gent ailée arrive assez vite à maturité

Avantage ou inconvénient je ne saurais dire

Mais comme nous autres je sens bien votre attachement

Que parfois vous cachez sous une carapace de fausse indifférence


Alors vous ne m’entendez pas mais perché sur le mur je pleure avec vous



Xavier Lainé

17 septembre 2024