mercredi 21 septembre 2022

Je vous écris de très loin 6

 




« Certains jours il ne faut pas craindre de nommer les choses impossibles à décrire. » René Char, Recherche de la base et du sommet


Nommer, toujours.

Mettre des mots sur quelque chose.

Regarder en face et se poser des questions.

Qu’est-ce que je vois que d’autres peut-être ne voient pas ?

Choses indescriptibles sur lesquelles je dois toutefois mettre des mots, nommer.

Nommer toujours.


Nommer toujours :

Le pauvre homme et sa main tremblante devant la boulangerie du matin frais.


Nommer toujours :

Vos larmes qui s’écoulent en silence d’être enfin quelque part écoutés.

Pas compris, juste écouté.

Pas forcément entendu non plus, mais écouté, avec des mots posés sur l’innommable de vos existences lacérées.


Nommer encore et toujours :

Le sentiment de révolte qui monte.

Exponentielle montée proportionnelle à celle des violences admises.

Pas nommées, admises.

Par fatalité admises.


Nommer pour ne pas devenir fou de douleur.

Lorsque d’amour il n’est plus question parce qu’amour est admis comme tel, coulé dans le bronze d’un quotidien sans relief qui se répète depuis si longtemps qu’il n’envisage plus un baiser, ni une étreinte.


Dès lors de quoi pourrais-je parler sinon dire l’effroi ?


Xavier Lainé


6 septembre 2022


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