Tandis que sous mes fenêtres ronfle la climatisation d’un camion frigorifique, arrêté pour livraison mais sans couper son moteur, mes yeux regardent le ciel qui laisse filtrer quelques gouttes de merveilleuse fraîcheur.
« Comme un chien pisse et aboie, comme un rossignol chante, un cerf brame, un éléphant barrit... un chasseur sonne du cor, un vil dragueur siffle une femme... un fabricant répand ses produits et crie dans le plus de volume possible la publicité de leur excellence prétendue. Chacun s'expanse dans l'espace. Ils pissent dans la piscine. Même le fumeur, même l'adolescent amateur du tintamarre émané de son deux-roues... crient la même affirmation de soi dans le volume ainsi envahi de volutes ou de sons: ego, ego, pète la moto de l'ado, révolté obéissant, puisque imitant servilement les proprios de son espace et de son temps, télé, pub et radio. Ses pets sortant d'un pot dut d'échappement, tout aussi bien nommé, je l'ai dit, que le fondement naturel ou, des vestales, la porte stercoraire. Inondé de pub, qui, assourdi, ne voit un anus dans le baffle d'un haut-parleur ? », écrivait Michel Serres (Le mal propre, Polluer pour s'approprier ? Editions Le Pommier, 2008)
Ils pissent sur la terre
Ils pissent dans les cieux
Laissent leurs étrons
Ils pissent et chient
Voilà la nature de l’homme moderne
Bouffer pisser puis enfin chier
Puis aller s’étonnant de la chaleur intense
Du dessèchement de l’herbe
Râlant quand enfin il pleut
Pestant de ne plus trouver de neige l’hiver
Dénaturés par l’industrie de consommation
Déracinés de toute appartenance à la planète
Nous voici en cette extrême urgence
Refusant de voir le mur qui s’approche
Oubliant de frapper à la porte
Des fortunes qui veillent au naufrage
Xavier Lainé
2 septembre 2022
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