lundi 26 juin 2023

Pousser les portes du devoir (Un chemin étroit avec Gide) 4

 



Vierge voilée de Giovanni Strazza (XIXème sicèle)

(Photographie glanée ici : Livingstone)


« Tout ce que tu gardes en toi de connaissances distinctes restera distinct de toi jusques à la consommation des siècles. Pourquoi y attaches-tu tant de prix ? » André Gide, Les nourritures terrestres


Mais bien sur la soif.

Cette soif, ce puits, cette mine qui plonge dans les profondeurs abyssales.

Qui ne trouve jamais totale satisfaction car de chaque question elle fait un nouveau volume à lire, à écrire.

Cette soif qui est mienne mais ne m’appartient pas.

Qui m’échappe chaque fois que je m’en approche.

Qui s’évanouit dans les brumes matinales.

Que mes mains sur le clavier du temps, tentent encore de saisir.

Elle s’en va, la connaissance.

Elle est à peine voilée, si fine, si subtile.

Ses pieds dans la rosée font scintiller sa tête comme une étoile filante.


Je crois toujours la voir.

Mais sans doute est-ce reliquat des déserts de mon enfance : elle n’est que mirage posé sur mon chemin.

Mes mains se tendent et ne saisissent que du vide.

Et je reste là, assis où je croyais trouver une oasis de savoir où m’abreuver.

Je ne saisis toujours que du vide, un vide qui ne m’appartient pas.


Toujours la connaissance se lève, radieuse et dans un grand rire, m’effleure des ses doigts de fée.

Un désir fou surgit des profondeurs de mon âme.

Comme j’aimerais me blottir entre ses bras tendre !

La voici qui se lève, s’éloigne.

Naïf je la suis, pensant toujours trouver dans la trace de ses pas quelque chose qui lui ressemblerait et pourrait satisfaire me soif, ma faim, mon désir.


Je me réveille en sueur.

La nuit est là, peuplée d’étoiles qui poussent petits rires cristallins puis s’effacent dans les premières lueurs de l’aube

La connaissance une fois encore m’échappe.

À quoi bon m’acharner à en saisir ne serait-ce qu’une bribe ?

Elle ne m’appartient pas.

Elle n’appartient à personne.

Elle est cette mine à creuser sans cesse.

Ce rocher de Sisyphe qui toujours retombe lourdement au bas de la montagne.

Il faudrait l’imaginer heureux, paraphraser Kuki Shuzo et Albert Camus.

Ce ne serait que paraphrase, mauvaise copie d’une mise en examen ratée. 


Aux questions je n’aurai pas de réponse.

Je me contenterai d’en noter le flot.

De ramer encore un peu sur l’océan du savoir.

Au risque de m’y noyer.



Xavier Lainé

4 juin 2023


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