Il faut peu de chose pour renforcer les digues
Juste un peu d’esprit
Un soupçon d’intelligence
Donc un meilleur accès au savoir
Car
On ne fait pas un pays intelligent
Sur les ruines de la connaissance
On ne fait pas un pays démocratique
Sur les ruines de l’esprit citoyen
Il faut fort peu de chose pour renforcer les digues
Il faut d’abord nommer ce qui vient
Appeler par son nom la philosophie qui en prépare la triste survenue
Oeuvrer sans cesse au partage respectueux dans le débat
Non celui qui se limite à dénoncer
Mais celui qui permet d’enrayer les peurs
Qui sont à la source de toutes méconnaissances
Il faut peu de choses
Apprendre et ré-apprendre
À ouvrir un livre en quittant les écrans de la soumission
À réfléchir à ce qu’on lit
À ce qu’on dit
Apprendre à décrypter les failles des discours
Nourris aux dogmes et vérités établies
Il faut peu de choses pour sauver notre humanité
Juste quitter les rives du profit sans limite
De la consommation sans modération
De la bêtise pandémique
Délivrée aux heures de pointes
Dans des médias achetés et vendus aux maîtres d’un système
Il faut enfin dire le nom de ce système
Dévoiler les visages de ceux qui s’y enrichissent
Dénoncer la honte qu’ils infligent au nom même d’humanité
Il faut dire à quoi ces gens là travaillent
De quels fléaux ils sont les responsables
À quelles basses oeuvres ils consacrent leurs vies
Pour sauver leur unique et inique profit
Il faut dire
Ne plus se laisser museler
Faire taire la meute qui parle avec condescendance
À un peuple toujours considéré comme inculte
Il faut dire le nom de cette pente
Qui dans l’histoire a toujours mené au pire
Avec une apogée au XXème siècle
Sous les traits hideux des totalitarismes
La peur
La haine de l’autre et de soi
Le repli frileux et l’intolérance au différent
Sont les moteurs de cette infâme résurgence
Il faut peu de chose pour en enrayer le cours
Juste un petit effort d’humanité
Par l’extension du domaine de la culture et du savoir
*
Joli mois de mai
Te voici qui t’écoule
Sans barricades ni manifestations
Quelque chose s’est rompu
Dans la joie de contester
D’appeler de nos voeux
Un autre monde
Tout est désormais canalisé
On va dans les meetings
Comme on va à la grand-messe
Écouter les prédicateurs
Nous dire que demain
Tout sera beaucoup mieux
Par la seule grâce de leur élection
Joli mois de mai
Qui sentait si bon
Les pavés descellés
Il ne reste pas grand chose
De notre propre pouvoir
À nous dresser devant les inopportuns
Aujourd’hui on nous dit
Qu’il suffirait de voter
Pour que le monde ait visage avenant
On nous fait oublier
Notre pouvoir d’agir et de contester
Car il n’est pas de démocratie
Sans peuple qui s’en saisit
Xavier Lainé
25 mai 2024
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