lundi 17 juin 2024

Pas dire 25

 




Il faut peu de chose pour renforcer les digues

Juste un peu d’esprit

Un soupçon d’intelligence

Donc un meilleur accès au savoir


Car


On ne fait pas un pays intelligent

Sur les ruines de la connaissance


On ne fait pas un pays démocratique

Sur les ruines de l’esprit citoyen


Il faut fort peu de chose pour renforcer les digues

Il faut d’abord nommer ce qui vient

Appeler par son nom la philosophie qui en prépare la triste survenue

Oeuvrer sans cesse au partage respectueux dans le débat

Non celui qui se limite à dénoncer

Mais celui qui permet d’enrayer les peurs 

Qui sont à la source de toutes méconnaissances


Il faut peu de choses

Apprendre et ré-apprendre

À ouvrir un livre en quittant les écrans de la soumission

À réfléchir à ce qu’on lit

À ce qu’on dit

Apprendre à décrypter les failles des discours 

Nourris aux dogmes et vérités établies


Il faut peu de choses pour sauver notre humanité

Juste quitter les rives du profit sans limite

De la consommation sans modération

De la bêtise pandémique 

Délivrée aux heures de pointes

Dans des médias achetés et vendus aux maîtres d’un système


Il faut enfin dire le nom de ce système

Dévoiler les visages de ceux qui s’y enrichissent

Dénoncer la honte qu’ils infligent au nom même d’humanité


Il faut dire à quoi ces gens là travaillent

De quels fléaux ils sont les responsables

À quelles basses oeuvres ils consacrent leurs vies

Pour sauver leur unique et inique profit


Il faut dire

Ne plus se laisser museler

Faire taire la meute qui parle avec condescendance

À un peuple toujours considéré comme inculte


Il faut dire le nom de cette pente

Qui dans l’histoire a toujours mené au pire

Avec une apogée au XXème siècle

Sous les traits hideux des totalitarismes


La peur

La haine de l’autre et de soi

Le repli frileux et l’intolérance au différent

Sont les moteurs de cette infâme résurgence


Il faut peu de chose pour en enrayer le cours

Juste un petit effort d’humanité

Par l’extension du domaine de la culture et du savoir


*


Joli mois de mai

Te voici qui t’écoule

Sans barricades ni manifestations


Quelque chose s’est rompu 

Dans la joie de contester

D’appeler de nos voeux

Un autre monde


Tout est désormais canalisé

On va dans les meetings

Comme on va à la grand-messe

Écouter les prédicateurs

Nous dire que demain

Tout sera beaucoup mieux

Par la seule grâce de leur élection


Joli mois de mai

Qui sentait si bon

Les pavés descellés

Il ne reste pas grand chose

De notre propre pouvoir

À nous dresser devant les inopportuns


Aujourd’hui on nous dit

Qu’il suffirait de voter

Pour que le monde ait visage avenant

On nous fait oublier 

Notre pouvoir d’agir et de contester


Car il n’est pas de démocratie 

Sans peuple qui s’en saisit



Xavier Lainé

25 mai 2024


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