C’est quoi vivre en territoire dévasté
C’est quoi sinon survivre et verser dans l’impensable
Dans l’innommable
Désormais que la boite de Pandore est ouverte
Que les monstres montrent leur vrai visage
Que nous savons vers quels naufrages nous allons
Alors comme avant de mourir on tente encore
De se raidir
D’empêcher le massacre
On fait semblant d’y croire
Pour simplement nous cramponner
À notre maigre radeau d’humanité
Le pays des droits de l’homme
Conduit par l’homme le plus cynique qui soit
Croyait faire barrage au pire
Le triste sire ouvrait des voies d’eau dans la coque
À grands coups de concession aux odieuses rengaines
Le pire est le naufrage des mots
L’effondrement du sens
On ne dit plus ce qui est
On travestit le réel sous des mots désossés
Dont le squelette disparaît sous la boue des mensonges
Nous en sommes là
Le poète dans le silence des livres
Pleure toutes les larmes de son corps
Quelque chose d’odieux se trame
Dont nous ne saurons peut-être jamais
Nous défaire de l’outrage
*
Tu croises du monde
Au hasard de tes déambulations citadines
Tu les dévisages
Tous ces gens que tu rencontres
Tu te dis que parmi eux
Trente pour cent ont fait le choix du pire
Rejoignant sans coup férir
La tribu des racistes
Même si certains clament que non
Mais si
Mais si
Vous y voilà rangés
Vous qui prétendez n’avoir jamais essayé
De boire du nettoyant WC
Vous devriez essayer pour voir
Peut-être que ça vous décaperait l’esprit
Aussi sûrement que les psalmodies médiatiques
Qui tentent de faire passer le brun pour du blanc
Et le rouge pour du brun
C’est ainsi qu’avance le fascisme
Dans cette méprise de la langue
Qui ne sait plus ce qu’elle dit
Faisant passer pour vraies
Les pires contre-vérités
Pour vérités les mensonges éculés
Langue qui vante la bêtise
Condamnant la connaissance
Au nom d’une haine du savoir
Xavier Lainé
6 juillet 2024