De corps en corps mes mains ne cessent d’explorer ce non-lieu.
Serions-nous in-corporels comme certaines oeuvres d’art seraient in-temporelles ?
Les siècles passent et toujours nous en restons à la même dichotomie, bien évidemment posée lourdement sur les épaules de Descartes.
La tarte à la crème de la distinction âme-corps érigée en dogme scolastique par une église triomphante nous poursuit mais nul ne remet en cause le dogme.
Et pourtant…
(26 janvier 2023 — 1 — 8h44)
*
Et pourtant, qui une seule fois a pu vivre dans cette schizophrénie ?
Qui a pu voguer sans corps à la surface du monde ?
Quelle poésie aurait pu jaillir si n’étaient des doigts pour en tracer les lettres et les mots ?
Étrange monde qui poursuit sa route en ce déni.
Nous ne sommes humains qu’incarnés, notre esprit jaillissant d’un corps nourri à l’expérience de la vie.
À défaut, nous ne serions qu’objet parmi tant d’autres.
Incapables du moindre affect, nous serions des monstres parfaits.
Nous ne gagnerions rien à une existence désincarnée !
« La vie esthétique se doit de cultiver les plaisirs et les disciplines du corps. Bien que l’expérience somatique soit peut-être irréductible à la formation linguistique, sa contribution à la formation de l’esprit et de la personnalité ne peut être niée et révèle en vérité l’erreur qui consiste à envisager l’esprit et le corps comme des entités séparées et à identifier étroitement le moi au premier.
…
Si nous pouvons émanciper et transformer le moi à travers un nouveau langage, nous pouvons aussi le libérer et le transfigurer à travers de nouvelles pratiques corporelles.
…
On devrait lire et écouter son corps plus attentivement ; il faudrait même dépasser les métaphores de la lecture et de l’écoute, trop liées au langage, et mieux apprendre à le ressentir1. »
Ainsi parle le philosophe : aurait-il la moindre chance d’être entendu ?
(26 janvier 2023 — 2 — 21h26)
Xavier Lainé
1 Richard Shusterman, L’art à l’état vif, Editions de minuit, 1992
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