vendredi 30 avril 2021

Rouge misère 33 (Nouveaux états chroniques de poésie - Volume 12 - Tome 3)

 




Il a un nom qu’il ne faut pas dire, sinon sous le manteau.

Un imprononçable car le dire c’est déjà lui retirer son masque.

C’est sacrilège de retirer le masque de celui dont il ne faut pas dire le nom.

Dont il ne faut pas dénoncer les exactions.

Dont il faudrait attendre qu’il s’adapte à toutes les conséquences de ses propres crimes.

Alors tu attends comme tout le monde.

C’est un jour sombre où des gens meurent.

Pas si nombreux que ça, ceux qui meurent.

Mais ils meurent faute de soin.

Essentiellement faute de soin.

Hier on te mitraillait sur une barricade.

Désormais on te laisse crever, de faim ici, de noyade là, de froid ailleurs.

Plus besoin de mitraille, il suffit de supprimer des lits d’hôpitaux, de ne plus payer les soignants sinon avec lance-pierre.

Ha ! Si seulement ils pouvaient rétablir l’esclavage mais à moindre frais !

C’est à dire que tu sois salarié, corvéable à merci dans ton chez toi, devant ton écran, disponible à toutes heures, mais sans salaire.

Car c’est encore trop de payer des gens, et puis pour le bien-être de la planète, ce serait bien de l’alléger de quelques millions de personnes.

Les pauvres, on le sait se reproduisent plus que les riches, alors multiplions les pauvres : ils feront la chair à canon de leur productivité.

Concentrés comme poulets en batterie dans des logements de promiscuité, ils seront faciles à contaminer.

Il resteront devant leur écran plat, dans leur vie plate, pensées à l’unisson.

Que tu puisses espérer une amende honorable de leur part, c’est te mettre le doigt dans l’oeil avec interdiction d’exprimer ta douleur.

Sans renversement du capital et de sa domination, il n’est aucune commémoration possible.

Réveille-toi, c’est l’heure !


Xavier Lainé


31 mars 2021 (4)


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