vendredi 8 novembre 2024

Temps étranges 12

 





Tu écris

C’est comme conjurer le sort

Qui te condamne au silence

En pays déjà mort


Tu écris

Tu t’assourdis de mots

Pour tenter d’oublier

Le fracas d’un monde qui explose

Ne sachant plus compter ses victimes


Tu écris

Pour tenter d’endiguer ton inquiétude

Entre amour et désir

Tu ne sais rien de la vie

Alors l’amour se meurt

Faute de trouver les mots

Capables de l’entretenir


Tu écris pourtant

Tes mots sont de flamme

Tu allumes un feu pour réchauffer ton coeur

Que plus aucun autre ne vient bercer

Dans un infinie tendresse


Tu écris donc

Pour conjurer ce que certains nomment vieillesse

Qui n’est que chemin devenu trop étroit pour marcher du même pas

Que celle qui autrefois accompagnais les tiens

Quand elle savait encore marcher

Et te sourire au grand soleil des cimes


*


Arrivé à ce niveau d’abandon

Tu ne sais de quoi serait faite ta destinée

Tu ne trouves pas le temps de vieillir

Pas le temps d’imaginer 

Ce que les humains du commun

Nomment vieillesse


Juste tu entends leurs plaintes

Il semble que ce soit douloureux

Qu’être vieux relève de la pathologie

Tu ne sais pas

Tu en ignores les symptômes

Et puis tu rêves


Tu rêves de mains amoureuses

Qui viendraient alléger tes peines

Or à ce qu’il semble

Justement vieux ne rime pas avec tendresse

Pourtant


Pourtant tu as soif

Au crépuscule pluvieux

Tu restes avec celle-ci


Tu fermes les yeux

Des amours impossibles te rejoignent

Pour des sarabandes nocturnes

D’éternelle jeunesse



Xavier Lainé

12 octobre 2024


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