dimanche 24 octobre 2021

Peindre dans l’air du temps (trilogie) Tome 1 - Théodore entre deux temps 26

 



Le baiser - Théodore Géricault




Certains parleraient ici « d’illumination » suivant en ceci Arthur qui ne croisa jamais Théodore.

D’autres viendront le ranger au rang des romantiques, cherchant amour et joie de vivre introuvables lorsque l’histoire s’emmêle.

Je reviens à la Semaine sainte. Je reviens à la boue des chemins creux et à la cruelle désillusion.

On croit se battre pour un pays, pour des idées, gros-Jean comme devant, on s’en va solitaire, creuser le sillon de l’art, histoire de n’avoir pas vécu pour rien.

On tente de laisser une trace, qui sera libre d’être suivie ou d’être effacée.

Que fait le temps sur l’oeuvre sinon la valider où la faire disparaître dans les oubliettes.


Je croise encore le chemin de Théodore.

Je m’avoue désappointé devant sa forme d’engagement.

Il brûle sa vie sur les toiles. 

Il brûle et sa combustion livre les derniers vestiges d’un temps de naufrages.

Nous les connaissons bien, ces moments où tout flanche.

Théodore veut croire encore à l’acharnement de la vie.

C’est sans doute là son mérite : il y croit encore.

Il se cramponne sur les rames d’un frêle esquif.

Il tente de survivre sur le radeau du siècle.

Le problème reste entier : à trop faire confiance aux démiurges, la vague nous terrasse.

Et nous allons, muets, chevauchant la houle, les cheveux aux quatre vents.

Nous allons, sans très bien savoir vers quoi, sinon la nécessité de vivre encore un peu, juste pour voir ce que sera le monde, après.

De générations en générations, il y a ce rêve fou : prédire un monde d’après qui soit moins pire que celui-là.


Xavier Lainé


27 juillet 2021


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