jeudi 8 avril 2021

Rouge misère 11 (Nouveaux états chroniques de poésie - Volume 12 - Tome 3)

 




Même pas crédible, cette amnésie qui frappe les esprits les plus pauvres.

Donc les victimes de ces temps de disette.

Que pouvoir fronce les sourcils et lève un doigt accusateur, voilà que tout le monde rentre dans le rang.

Que chacun retourne à ses occupations, à ses ivresses, à ses souffrances.

Il en fut ainsi après 89, 48, 71, 36, 47, 68…

Que pouvoir frappe et les échines plient sous la charge policière.

L’espoir ravalé, tu plonges dans la désillusion.

Hier certains te faisaient miroiter la lune.

Le pire est de les avoir cru.

Lentement, ils t’ont guidé vers la sortie.

Cent cinquante ans plus tard, tu es pauvre et tu le restes, tu ne crois plus en rien.

La bourgeoisie sait avec adresse se faire fossoyeuse des plus simples espérances.

L’aristocratie avait la faiblesse de se croire hors du lot.

Les bourgeois qui lui succèdent savent avec adresse user de leur perversité.

Et toujours les mêmes qui font cohortes au pointage des vies mortes.

Mortes sans indemnités.

Car vivre suspendu aux caprices des dominants, ce n’est pas vivre.

C’est bien pourquoi, j’ai été de toutes les jacqueries, de tous les instants révolutionnaires, de toutes les manifestations pour ou contre.

Je vis avec en sourdine le chant des canuts, celui des communards, des partisans.

Je vis avec ce rêve d’un monde ou le rouge ne ferait plus ce petit tiers d’un emblème national, mais serait le symbole d’un peuple enfin capable de s’inventer son monde.

Autrement, je ne vis pas, je me contente de traverser l’espace, de me réjouir des floraisons printanières sans lendemain qui chante.


Xavier Lainé


12 mars 2021


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