J’habitais dans un trou
Un no man’s land
Un lieu inconnu et invisible
J’habitais en zone interdite
Un non lieu
Par la grâce d’édiles en soif de travaux
Mon trou ne cessait de s’approfondir
Chaque pas me menait au précipice
Un grand vide s’ouvrait devant mes pensées
Elles se mettaient à errer en zones marécageuses
S’enfonçaient dans les sables mouvants de l’absence
Lentement mais surement on y allait
Certes parfois on râlait
Mais c’était de pure forme
On se contentait de déplorer
La boue et l’instabilité du sol
J’habitais un non lieu
Un trou noir dans la géographie locale
Des ombres passaient dans les rues apocalyptiques
Ne pouvant que regarder leurs pieds
Elles avançaient tête baissée
Droit dans le mur des indifférences
J’habitais en lieu hébété
Un lieu dont l’esprit était aspiré
Dans le trou noir des apparences
Certes ce serait beau un jour
Mais vide
Si vide que même les corbeaux
Finiraient par s’en détourner
*
Alors que j’me suis dit
Avant qu’ils ne s’envolent
Faudrait que je crée des passerelles
Pour passer d’un côté à l’autre
Du vide ouvert sous nos pieds
Par d’insondables inconsciences
Alors que j’me suis dit
Je vais jeter mes mots
Comme poussières dans les yeux
Des démolisseurs en règle
Ils sauront bien mes mots
Être grains de sable dans les rouages
Des machines qui creusent
Des machines qui creusent nos âmes
Qui vident nos poches
Font de ma ville un trou noir
Qui aspire toute création
Alors que j’me suis dit
Je vais faire de mes mots digue ou barrage
Pour que tous les oiseaux musiciens
Les migrateurs de la danse
Les peintres de l’avenir soient pris dans leur filet
Pour élire domicile au bord de ces gouffres
Ouverts sous nos pieds
Alors que j’me suis dit
J’irai de nuit boucher toutes les tranchées
De cette guerre menée à nos mémoires
Avec les mots d’espoir et de désespoir
Xavier Lainé
4 février 2025
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