Le plus simple est d’étouffer
Étouffer la parole quand elle dénonce
N’autoriser que celle qui va compter fleurette
Regardant papillons voler
Pour ne pas voir ruines et misères
Le plus simple est d’étouffer
Ou de faire craindre l’étouffement
À qui voudrait dire ce qui est
Sans se réclamer d’aucune vérité
Sinon celle du constat accablant
Le plus simple est d’étouffer
Toute révolte dans l’oeuf
Par l’usage immodéré de violence
Sans un mot pour les meurtris
Tombés sous les mauvais coups
Le plus simple est d’étouffer
De pousser chacun à se cloitrer
Devant ses médias muselés
N’osant plus bouger de peur
De troubler la « paix sociale »
Le plus simple est d’étouffer
D’empêcher tout dire de jaillir
Quand les souffrances endurées
Ne sont plus seulement symptômes
Mais maladies qui accusent
*
Le plus simple est de ne pas accepter
D’user et abuser de notre droit humain
À la parole contraire
*
Toujours à revers et dans le sens contraire du poil
Si possible en trempant la plume
Dans du poil à gratter
Histoire de vous donner de l’urticaire
Mes pages seront d’orties
Car je n’arrive pas à m’y faire
À ce silence pesant
À ces yeux qui ne voient rien
À ces bouches qui ne disent rien
Où qui lorsqu’elles s’ouvrent
N’ont rien à dire d’autre
Que psalmodier les mantras
Des puissants et des possédants
Toujours à revers et dans le sens contraire du poil
Mes mots se font poil à gratter et orties
Mes mots voudraient vous y rouler
Histoire de voir si vous êtes morts ou vivants
Ne voyez rien contre qui que ce soit
Juste caillou dans la chaussure ou épine dans le pied
De ceux qui traversent sans s’émouvoir
Tandis qu’à une encablure des enfants meurent sous les bombes
Qu’importe celui qui en commande l’usage et sa croyance
Pour son acte criminel et le silence qui l’accompagne
Je m’en vais souhaiter qu’il ait le cul qui gratte
Pour le restant de sa vie (de leur vie quand les témoins se taisent)
*
Étrange climat
Qui nous soupçonne d’être ce que nous ne sommes pas
Au motif de ne pas être d’accord
Avec un gouvernement
Nous voici assimilés à des « terroristes »
L’accusation est lancée sur toutes les ondes
Sans preuve
Juste le fait de n’être pas du même bord
Mais voici que religion s’en mêle
Qu’il faut prêter allégeance
Non seulement au pouvoir
Mais aux dogmes divins
À défaut nous voici accusés
Sur ce banc d’infamie
Nous sommes trainés dans la boue
Tandis qu’avec les puissants
Ils dépècent à belles dents
Tout ce qui aurait pu contribuer
À réduire la misère
Étrange climat que celui-ci
Qui sème ses nuées d’orage et de bombe
Sur la tête des innocents
Xavier Lainé
5 mai 2024