samedi 7 novembre 2020

Lettre du bord du gouffre 9

 




Que faudrait-il dire, écrire, clamer pour que soit entendu le cri de notre terre ? Nous allons au pas d’un affolement dirigé, orchestré sous les coups d’un virus dont nous ne savons au juste pas très bien ce qu’il fait.

On cause, on répand sombres rumeurs, on panique dans les services, on branle de la pensée, on laisse pouvoir totalitaire s’insinuer dans nos vies. On s’agite, on s’émeut pour les morts, et on a raison, mais…


Mais quoi : étrangement les statistiques ne sont pas si affolante. Mais il est, vrai, je le disais hier, qu’on peut leur faire dire ce qu’on veut.

Chacun y va de la tragédie d’un voisin qui a souffert le martyre, d’un ami qui étrangement développait symptômes mais sans être déclaré positif. Chacun y va de ses suppositions, de ses hypothèses sous le regard médusés de scientifiques aussi paumés que le vulgum pecus.


« Discerner suppose du temps, de la patience, de la prudence, un art de scruter, d’observer, d’être à l’affût : on discerne en retenant son souffle, en devenant plus silencieux, en se faisant voyant et non voyeur, en disparaissant pour mieux laisser la chose observée se comporter naturellement. » (Cynthia Fleury, in Ci-gît l’amer, éditions Gallimard, 2020)

Voici donc, dans cette agitation et cette fébrilité ce qui est manque, absence, escalade mortifère dans un nihilisme organisé.


Qui peut prétendre savoir de quoi il en retournera sous peu des vivants, dans l’emballement sordide des catastrophes humaines et donc planétaires ?

Ce qu’on nomme l’Anthropocène ne serait donc que l’ultime avatar d’un capitalisme du désastre voué et entraînant sa et notre propre perte.


Un peu plus loin, Cynthia Fleury ajoute : « La perte de discernement est le premier symptôme des pathologies narcissiques et des troubles psychotiques. » À tourner autour de nous-mêmes, chacun pour soi dans sa bulle d’absence à l’autre, nous voici embarqués dans le cycle infernal des auto-destructions.

Qu’ici ou là, des individus s’affairent à créer leur bulle de changement ne changera rien à l’affaire. Sous nos pieds la terre bouillonne et n’en peu plus de notre pesanteur à nous changer, solidairement.


A suivre...



Xavier Lainé


7 novembre 2020


Coup de chaud pour les rennes de Sibérie


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