Revenir au poème pour ce qu’il a de salvateur : une parole libérée de la gangue crasseuse d’un temps sans parole.
Un temps de parole usurpée, privatisée, détournée de tout sens commun.
Un temps qui ne tient plus parole, qui s’étire en vaines promesses, en mascarades absurdes.
Mots vidés de leur espérance, au profit d’un non-dit qui fait tomber les masques.
Pas tous, et c’est peut-être pourquoi on oblige les communs à en porter un sans urgence sanitaire évidente.
Les uns tombent, les autres se figent devant le spectacle atterrant du mensonge intronisé en règle.
Nous voici tous sidérés.
Que peut bien faire le poème en telles circonstances ?
Sinon déposer des mots comme gerbes de fleurs sur la barque échouée de nos espérances.
Puis, discrètement, tisser les couronnes d’un nouveau départ sous le commandement d’autres capitaines.
Car poursuivre sous les ordres des mêmes serait vouer l’humanité à son plus strict naufrage.
Besoin d’air, besoin d’étreindre, d’embrasser, d’aimer.
Besoin de voir vos visages parfois heureux, parfois renfrognés.
Besoin d’un monde qui nous fasse grandir et non de celui-ci qui ne cesse de nous rabaisser.
Besoin de vivre quand il en est encore temps, de tomber amoureux, de rire au grand soleil, de chanter à tue tête et de dire des mots doux dans la caresse du vent.
Besoin d’écrire non pour être lu mais pour prendre parole et la tenir.
Oui, tenir parole, justement, ce que nous ne savons plus faire.
Xavier Lainé
20 août 2020
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