Le printemps a des allures d'arbre mort.
Je sais, je ne devrais pas.
Je ne devrais pas écrire ce qui fâche.
Je ne devrais pas mettre les pieds dans le plat,
ni jouer les empêcheurs de tourner en rond
dans le bocal hors sol des dictatures soft.
Le printemps a des allures d'arbre mort,
mort exsangue en Palestine ou en Syrie
mort Ouïgour dans les camps modernes de la mort
mort en Colombie d'avoir trop voulu sourire et puis vivre
Je sais, je ne devrais pas.
Je ne devrais pas vous jeter sous les yeux,
le résultat tangible et visible de nos petites indifférences
de nos soupirs d'impuissance : je ne devrais pas vous fâcher
dans le doux matin d'un printemps d'arbres morts
morts de soif et morts d'avoir voulu vivre.
Je ne devrais pas, dès votre petit déjeuner
gâcher vos tartines et votre beurre
avec la tristesse d'un monde d'où l'humanité s'est enfuie
tandis que vous alliez avec écharpe tricolore
vanter les mérites de vains patriotismes
vaines fiertés mal placées quand,
quelles que soient les guerres et les cultures,
ce sont toujours les mêmes qui souffrent et tombent,
le nez dans le ruisseau, sans que Rousseau n'y puisse rien
Pardonnez-moi de vous faire fuir devant mes âpres mots.
Mais si vous arrivez encore à dormir
quand on crève si près de chez vous,
je n'écris pas pour vous.
J’écris pour les âmes sensibles
celles propres à la révolte et à l'insoumission :
pas celle qui trône comme une marque déposée
aux vaines assemblées qui ignorent le peuple.
Celle qui se révolte et se réveille mutilée,
dans les geôles de prétendues démocraties.
Mes mots roulent en cascades
mes mots se voudraient barricades
mes mots se voudraient remparts
douce protection pour tous les délaissés de l'histoire.
Xavier Lainé
9 mai 2021
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