vendredi 10 janvier 2025

Chaque jour t’évader 5

 





Tu n’écris pas pour passer le temps

Ni pour te raconter des histoires

Ni pour endormir les esprits de passage

Et encore moins pour les divertir


Écrire pour toi c’est comme donner

Un coup de pied dans la fourmilière

Réveiller le lecteur de sa torpeur

L’inviter dans un monde différent

Où il ne serait plus victime consentante



Xavier Lainé

5 décembre 2024


jeudi 9 janvier 2025

Chaque jour t’évader 4

 





Chaque jour t’évader

De cette prison où d’obscurs corrompus

Se cramponnent au pouvoir

Tandis que devant leur porte

On agonise 

On étouffe


Chaque jour ouvrir les portes

De cet enfer sur terre

Maintenu de mains de fer

Par les plus tristes humains

Aveugles et sourds

À la misère qui crie


Chaque jour ouvrir les fenêtres

Tendre mains secourables

Aux délaissés du monde

Prendre à pleines mains

Les souffrances abjectes

Infligées sans état d’âme

Entendre les soupirs de désespoir

Poussés lorsque l’âme enfin s’apaise


Chaque jour tu vas de ce pas

Affirmant l’impossible pardon

Lorsque tes mains plongent en tremblant

Au coeur même des tragédies

Qui ne se disent pas

Qui sont endurées

Dents et poings serrés

Pour ne pas hurler de rage



Xavier Lainé

4 décembre 2024


mercredi 8 janvier 2025

Chaque jour t’évader 3

 





Nuit

Nuit sur la vie

Nuit sur la terre

Nuit


Vie

Vie diurne 

Vie nocturne

Vie


Il n’est pas de frontière à la vie

Pas non plus de routes ou d’autoroutes

Juste des sentiers buissonniers

Des chemins creux

Sous les frondaisons denses


Mais

L’homme ne cesse de chanter

La longue litanie de ses souffrances

Endurées et provoquées

Par quelques uns de ses semblables

Qui ont perdu le sens

Vivant hors sol

Loin 

Si loin


Nuit

Vie

Soupir

Larmes


Vivre

Envers et contre tout



Xavier Lainé

3 décembre 2024


mardi 7 janvier 2025

Chaque jour t’évader 2

 





Ecrire en pointillé pour ne pas empiéter sur la vie

Vie comme un ouragan qui te mène et t’emporte

T’emporte sur des ailes de vains désirs toujours abandonnés

Abandonnés les rêves derrière la porte des pages

Pages désertes où laisser errer tes rêves d’amour comblé

Comblé de mots hagards une fois franchie la frontière du réel

Réel qui s’offre si misérable à tes yeux bordés de larmes

Larmes combien encore faudra-t-il en verser pour guérir

Guérir le monde de ses plaies et de ses bosses savamment orchestrées


Tu pourrais continuer longtemps

Mais l’heure tourne

Tu ne peux voler du temps 

Aux souffrances en attente

Qui entendent le bruit de tes doigts

Sur le clavier éperdu de tes rêves littéraires


Te taire



Xavier Lainé

2 décembre 2024

dimanche 5 janvier 2025

Juste avant fermeture

 

C'était le 21 décembre 2024. Nous avions appris, un peu incrédules, la décision de ramener dans la gestion municipale le Centre Carzou et les oeuvres monumentales qu'il contient, et aussitôt celle de fermer pour une durée indéterminée ce lieu de culture en invoquant la nécessité d'y entreprendre des travaux (une aile de la chapelle il est vrai en a bien besoin, mais de là à fermer l'ensemble qui avait enfin retrouvé vie !).

J'ai proposé, devant les oeuvres apocalyptiques de Carzou, d'y lire à haute voix des extraits de mon livre publié en 2009 aux éditions L'Harmattan. Ces textes entraient en étrange résonance avec les oeuvres mais aussi avec la période mondiale que nous vivons, sous la menace des fous de pouvoir, d'argent, de religions.

Mon fils Matthieu a décidé de m'accompagner et de filmer cette performance. 

En voici donc la trace. Un lieu de culture a fermé immédiatement après. Quel sens donner au symbole, inconscient sans doute, que représente cette fermeture par une municipalité atteinte de gestionnite aigüe ?


Carzou 2024 12 21 X Lainé Lecture La mille et unième nuit extraits

 

vendredi 3 janvier 2025

Chaque jour t’évader 1





 


Tu dis t’habituer au silence qui accompagne tes mots

Depuis tant d’années tu les largues sur les ondes

Qui sont bouteilles à la mer d’une humanité en errance

Qui ne connaît de littérature que ce qu’elle sait déjà

Qui n’ouvre la porte qu’aux noms qui font la une

D’un empire médiatique où sitôt dit sitôt oublié


Tu dis t’y habituer mais tu n’y arrives pas vraiment

Tu t’inquiètes de savoir ce qui cloche en toi ou dans tes mots

Pour qu’ils restent derrière la porte tapis comme des ombres

Sans que nul ne songe à les faire entrer un peu au chaud 

Pour rencontrer une humanité curieuse comme tu l’es


Tu dis et tu écris

Les années passent qui voient parfois tes mots 

Se glisser entre deux couvertures

Sortant de l’univers anonyme de réseaux a-sociaux

Rencontrent alors une éphémère lumière

Qui s’éteint aussi vite qu’elle s’était allumée


Tu rentres chez toi

T’en veux d’avoir cédé ne serait-ce qu’un instant

Au vent mauvais d’une fausse célébrité

Car ce n’est pas toi 

Ce sont tes mots que tu voudrais voir vivre

Que tu voudrais voir briller dans les yeux de tes lecteurs

Mais sans doute ont-ils le goût sombre

D’un monde qui se noie dans profits et violences

Qu’ils ne savent donc pas ou qu’ils ont perdu

Le fil d’un chant poétique vibrant d’amour 

Que voulez-vous c’est ainsi

Lorsque dans une vie le fil casse

Il est parfois bien délicat d’en renouer la continuité



Xavier Lainé

1er décembre 2024