C’est dur constat que le sujet soit si peu abordé.
Il est vrai qu’à s’accoutumer à la domination, on finit par la trouver naturelle.
En faire poème n’est pas si évident.
Surtout lorsque les bombes pleuvent sur un peuple qui ne demande qu’à vivre sur ses terres ancestrales.
La ligue des colonisateurs ne trouve rien à dire.
Du génocide des indiens d’Amérique à la réduction en esclavage des peuples d’Afrique, les dominants ont acquis une sombre expérience.
Avec l’appui du goupillon, les basses oeuvres se poursuivent.
De colons catholiques à colons sionistes, la cordiale entente est en place.
Nul ne trouvera à redire si les repris de justice héritiers des années noires du siècle passé se rendent à Tel-Aviv soutenir les génocidaires.
Nul ne saura que dans le même temps les rues résonnent des cris d’opposition de milliers d’israéliens aux massacres en cours.
Ici on emprisonne et poursuit celles et ceux qui expriment leur désaccord.
Mais peut-être les soutiens médiatiques de la ligue des dominants iront traiter les manifestants d’antisémites.
Les mots ne veulent plus rien dire.
C’est pourquoi il me reste poésie pour encore chanter.
Demain peut-être, une fois mon propos publié, viendront-ils me passer les menottes.
Rien de grave.
« Ils ont voulu nous enterrer, ils ne savaient pas que nous étions des graines ».
De cellules en cellules nous reprendront la chanson des prisonniers grecs sous la dictature des colonels :
Nous sommes deux
Nous sommes deux
Huit heures vont bientôt sonner.
Eteins la lampe, le gardien frappe
Ce soir ils reviendront nous voir.
L’un va devant, l’un va devant
Et les autres suivent derrière
Puis le silence et puis voici
La même chanson qui revient
L’un va devant, l’un va devant
Et les autres suivent derrière
Puis le silence et puis voici
La même chanson qui revient
Il frappe deux
Il frappe trois
Il frappe mille vingt et trois
Tu as mal, toi
Et j’ai mal, moi
Qui de nous deux a le plus mal ?
C’est l’avenir qui le dira
Nous sommes deux
Nous sommes trois
Nous sommes mille vingt et trois
Avec le temps, avec la pluie
Avec le sang qui a séché
Et la douleur qui vit en nous
Qui nous transperce et qui nous cloue
Nous sommes deux
Nous sommes trois
Nous sommes mille vingt et trois
Avec le temps, avec la pluie
Avec le sang qui a séché
Et la douleur qui vit en nous
Qui nous transperce et qui nous cloue
Notre douleur nous guidera
Nous sommes deux
Nous sommes trois
Nous sommes mille vingt et trois
Inlassablement il nous faudra dénoncer la tyrannie des dominants, extraire en nos coeurs mêmes toutes velléités de cet esprit qui assombrit depuis la nuit des temps notre humanité.
Nous devrons lire et relire La Boétie et Bourdieu, Max Weber et toutes celles et ceux qui se sont penché sur cette question essentielle.
Pour sortir d’un système et en construire un autre, il faut être capable d’en décrypter les racines les plus profondes : domination, racisme, génocide et nettoyage ethnique sont à la source même du système qui continue à en nourrir le flot.
Ce n’est pas seulement question politique, mais aussi poétique car problématique d’humanité.
Xavier Lainé
31 mars 2025
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