mercredi 5 octobre 2022

Je vous écris de très loin 20

 




Pour rien au monde je n’aurais laissé de côté la célébration.

Tant de fastes, n’est-ce pas ?

Entendez-vous ?

Non, vous n’entendez pas le long cri.

Ce long cri qui montait en menace de grève générale.

Celui des « dépossédés » au profit des fastes.

Que voulez-vous que me fasse la mort d’une vieille reine

D’une vieille reine parvenue assez loin pour ne pouvoir faire autre chose que mourir.

Mais les fastes, ha ! Les fastes.

La démonstration de richesse tandis qu’on crève dans les bas-fond de Londres et d’ailleurs.

Pour rien au monde je n’aurais manqué ça !

D’ailleurs, m’en aurait-on laissé le choix ?

Pas un écran, pas un journal, pas une page, pas un moment sans les fastes.

Qu’importe qu’on meure en Iran à vingt ans.

Qu’importe qu’on crève en Méditerranée, par faim et soif, ou noyade.

Qu’importe qu’on meure sous les coups de la soldatesque russe.

Ha ! Les fastes et la pompe !

Que m’importe la mort d’une vieille reine décatie et sa succession incapable de déplacer un encrier par elle-même !

Que m’importe !

Car on meurt devant ma porte tous les jours.

Tous les jours on subit la violence des riches qui se rendent en grande pompe à l’enterrement d’une vieille reine qui ne pouvait que mourir.

Au moins là, devant cette porte mystérieuse, nous sommes égaux.

Mais pas tout à fait.

Il y a mort et Mort en ce monde, comme il y a poète et Poète.

Il y a ceux qui s’habituent à la pompe et aux fastes.

Ceux qui savent les cirer, les pompes des puissants, en amusant la galerie des dépossédés.

Et puis ceux qui ne sont « rien », on vous l’a dit et répété.

On vous le fait bien sentir : les riens ne sont rien.


Xavier Lainé


21 septembre 2022 (1)

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