dimanche 4 septembre 2022

Juste retournement des choses 20

 




Il errait, le spleen à la paupière, retenant ses larmes.

Il errait.

Que dire de cette errance qui durait depuis si longtemps qu’elle en devenait son ombre et son portrait ?

Il y croyait, à l’amour comme au bonheur, comme on croit en un dieu qui se révèle cupide et lâche.


Il est dur le spleen qui coule sur l’échine d’une vie.

Il transpire à chaque mot prononcé, à chaque pas posé sur la terre éreintée.


Il errait.

Que voyez-vous en cette errance, sinon le vide absolu une fois le temps écoulé ?

Il errait avec la conscience de n’être que de passage.

Il ne pouvait se plier aux usages prétentieux de briller.

Il errait pour s’effacer.


Les mots seront sans doute l’unique trace de son passage.

Lui, vous l’oublierez vite : il n’était qu’usine et labeur obscur.

Il tremblait dans la main tendue des désespérés.

Il se réjouissait d’un baiser entrevu à l’ombre des charmilles.

Il s’asseyait sur un banc à l’insu de tous.

Il fermait les yeux et tendait ses lèvres vers le ciel dans l’attente vaine.

Il rêvait de folles étreintes qui ne venaient plus jamais.

Le temps passe sur l’errance comme sur la vie.


On attend sur un banc loin de tout passage.

Et puis un jour on s’endort et le silence s’empare du chemin.

Il ne reste qu’une ombre sur le tableau d’une terre reprenant ses droits.


Xavier Lainé


20 août 2022


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