J’ai vu mes amis Arawaks tomber, les uns sous le coup des fièvres, les autres sous les balles de mes compatriotes aveuglés.
Ils allaient au devant de leur mort avec la naïveté des enfants. Je tentais en vain de leur exprimer toutes mes craintes. Je les connaissais, ces marins avinés, assoiffés de sexe et de violence.
Je savais de quoi ils étaient capables, croyant avoir abordé dans la splendeur des Indes, se découvrant sur une île perdue en compagnie de ceux qu’ils considéraient comme des sauvages.
Je les savais capable du pire. Ils ne rêvaient, ces repris de justice abordant au nouveau monde, qui n’était nouveau que pour eux, que d’en découdre et de s’accaparer ces terres qui n’était revendiquées par personne, pas même par ceux qui y vivaient depuis des siècles.
Il leur fallait l’or et la possession des territoires. A cet usage, ils rendirent esclaves femmes et hommes encore vivants pour les faire travailler à chercher l’or et la fortune que ceux-ci méprisaient.
Pour mes frères Arawaks, la vraie fortune était dans leur connaissance de la nature, dans une vie en accord avec celle-ci qu’ils respectaient comme une divinité. Ils étaient à l’écoute de celle-ci avec un profond respect.
Ha ! Si seulement mes compatriotes avaient su respecter les lois que leur propre divinité leur dictait !
Mais de ce côté là, il n’était que dogme récité pieusement pour mieux en piétiner les valeurs une fois la messe dite.
Comprenez donc la surprise des mal nommés « indiens » devant le spectacle hideux de ces hommes capables du pire après confession.
J’ai vu ainsi mes amis du nouveau monde lentement s’éteindre sous les mauvais coups des maladies importées et de la violence sans limite de ces individus sans foi ni loi.
J’ai pleuré comme je pleure depuis devant les génocides qui se succèdent, comme s’ils étaient partie intégrante de ce monde de repris de justice qui ne connaissent de la vie que la grosseur de leur porte-feuille.
Cette gangrène venue d’Europe, je l’ai vue se répandre sur ce continent sans nom qu’ils nommèrent Amérique, convaincus de leur morgue dominatrice.
Xavier Lainé
17 septembre 2025

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